Isabella Bordoni, Interprète de la relation entre l'écriture, le corps et le paysage.
Le projet: REFUGEE. Stati d'esilio|Epifanie [2011- 2014]. S'il est possible et juste de resumer un projet que l'on ne connaît qu'en partie et dont l'autre partie est in fieri, je dirais que Refugee est né de l'urgence d'habiter le seuil entre parole et action, l'espace biopolitique des corps dans la relation avec le langage et le paysage, pour comprendre si corps et paysage peuvent être "refondés" en tant qu'espace d'utopie et de liberté.
SA: On commence par le début: quand avez-vous inventé le projet REFUGEE. Stati d'esilio|Epifanie [2011- 2014]; que cherchiez-vous, quelle piste aviez-vous dans la tête et est-ce que vous aviez déjà un parcours qui associait des lieux et des thématiques.
IB: Au commencement c'est un excédent et cet excédent - lorsqu'il est vraiment ainsi - c'est un plein qui produit du vide. Dans le cas de Refugee, le début se place en 2010, c'est la conséquence du projet que j'avais en cours à cette époque-là, Contro la purezza. Ce début a créé le maillon entre vide et plein: un processus de vidange qui - en quittant le lieu fermé et sombre où Contro la purezza avait choisir de rester - cherchait, dans l'éclos, la possibilité d'apprendre un équilibrage de la lumière et du regard. L'excédent de l'époque voulait dire travailler longuement autour des états et aux lieux du confinement du corps et du contrôle de la psyché. Contro la purezza était cela aussi, un long travail autour des restes de bâtiments en équilibre instable entre ruine et monument (tous lieux d'enfermement mais lieux ex, ex prison, ex hôpital psychiatrique, ex camp de détention) qui a créé un tourbillon dans le noir, où la "pureté" donnée comme être fixe et immobile m'avait déjà demandé de bouger avec un mouvement contraire. J'ai été entre la fin d'un projet et le début de l'autre, dans un processus de vidange me posant la question du maintenant. "Et maintenant?" Là qu'on a creusé dans l'histoire, dans ses décombres et ses rugosités, dans son noir, dans son clos, dans la patographie individuelle, familiale, sociale, historique, et maintenant? Cette question n'avait pas de réponse et c'est pour cette réponse que je me suis mis en marche. Pour comprendre de façon évidente que la question était encore contradictoire: le chemin réel, physique, corporel, c'est un acte d'évasion qui s'accomplit en plein air. Toutefois l'ouvert n'est pas un espace de liberté, mais c'est lui aussi un espace normé. Cela puis coïncidait, dramatiquement, en 2010, avec la chute de certaines dictatures des Pays Arabes qui a engendré des déplacements de vies, des corps qui s'échappaient de régimes dictatoriaux mais se précipitaient non moins tragiquement dans un (courant) ouvert, qui, pour secourir la vie, requiert des statuts de reconnaissance, non en vertu du ton être créature vivante mais au nom d'Etats et Nations. Refugee a voulu assumer des domaines de réflexion qui, rassemblés autour des mots "patrie" et "citoyenneté", abordent la question des corps.
S'il est possible et juste de resumer un projet que l'on ne connaît qu'en partie et dont l'autre partie est in fieri, je dirais que Refugee est né de l'urgence d'habiter le seuil entre parole et action, l'espace biopolitique des corps dans la relation avec le langage et le paysage, pour comprendre si corps et paysage peuvent être "refondés" en tant qu'espace d'utopie et de liberté. Refugee est part du Montefeltro, a accosté pendant l'été 2011 l'Alta Val di Susa, est passé pendant l'hiver 2011 par la Valle Tanaro, s'est arrêté à la limite d'Etats, a cherché les montagnes et ses imaginaires, les identités, les perspectives de la lumière, les utopies, les retours. En été 2012 un livre d'artiste a vu le jour. Il s'agit d'un livre que depuis l'hiver de la même année j'utilise en tant que dispositif. Le dispositif "livre d'artiste" fait en sorte que le projet de marche se configure à présent comme un proget de petits arrêts.
SA: Je vous suis depuis plusieurs années et j'ai souvent relevé l'obstination et la tenacité d'une approche de projet à long terme, caractérisée par de complexes phases de gestation et des étapes successives qui confluent souvent - comme dans le cas du projet actuel - en oeuvres ou publications qui, à leur tour, ne ferment pas, mais ouvrent le parcours à des rencontres nouvelles et à des développements nouveaux. J'aimerais que vous parliez de cette nécessité, de l'importance qui ont pour vous le temps et l'étude dans la réalisation d'une idée. Dans vos textes et dans les interviews, vous avez toujours souligné ce facteur: la longue durée des projets. Il pourrait apparaître un concept évident, mais ce ne l'est pas. Il n'y a pas d'équation donnée qui attribue une valeur spécifique au processus plutôt qu'à l'oeuvre d'intelligence; c'est pourquoi je ne veux pas considérer ce parcours comme allant de soi. Que signifie-t-elle recherche pour vous? Il y a une expression qui m'a frappée à ce propos, dans la présentation du travail Refugee: "Tra paesaggio et tempo (Entre paysage et temps)". Que me dites-vous?
IB: Oui, cela fait plusieurs années que je suis impliquée dans de longs processus de sens. Je nais artistiquement sur la scène européenne des arts multimédia et numériques de la deuxième partie des années 1980 et début années 1990, et, en Italie j'ai toujours été un outisider, même quand mon travail était plus conventionnellement reconnu dans le domaine du théâtre. Mais déjà à partir de la fin de l'année 2000, j'ai abdiqué les conventions productives du théâtre qui demandaient (effectivement à l'époque plus qu'aujourd'hui, suite à des raisons évidentes qui ont plus tard démanteler cette économie théâtrale aussi) une production nouvelle pour toute nouvelle saison. A ce point-là, à l'âge déjà plutôt adulte, je me suis trouvée devant à un seuil qui a demandé un travail de recostruction longue, parcimonieuse, très précieuse de mes connexions avec le monde. Dans cette phase, traumatisante autant que prometteuse, je ne pouvais pas être pressée parce que ce seuil était aussi un réveil qui exigeait un effort énorme de rééducation à la vie. Benjamin affirme que Le réveil est une 'technique' du congé de passé; en faisant du réveil le cas exemplaire du se remémorer.
Quelque chose de similaire au sens benjaminien s'est produit en moi, parce que la première conséquence de ce traumatisme fut une sorte d'amnésie et pour consentir à la remémoration - qui n'est pas le rappel mais l'évoquer à la mémoire - d'occuper un espace propre à elle et de faire cela au nom de la vie, je devais trouver la force d'un congé et par lui, d'un nouvel acte linguistique aussi. Un travail d'évocation et nomination qui demande de mourir et de naître encore. Prise dans un processus de ce genre, le temps ne peut pas être adversaire. L'amitié avec le temps renverse certains agencements et consiste en premier lieu en un abandon de la cristallisation de l'image du temps et de l'histoire. Cela signifie pouvoir habiter le temps de la même possibilité qu'on peut habiter un lieu, c'est-à-dire identifier dans le temps sa dimension de paysage et identifier dans le paysage sa dimension de temps. Parfois il suffit un seul déclic pour réjoindre avec quelques pièces manquantes le puzzle qui nous a occupé pendant des années et commencer faire une synthèse, pour moi le déclic a été de revoir dans l'esprit d'une journée de grande absorbance visuelle, au Kunsthistorisches Museum de Vienne, une peinture de Raphaël.
Mais ce revoir -voir une deuxième fois- n'est pas une action neutre, au contraire, et dans ce cas aussi cela a été le fruit d'une hybridation. En effet je n'étais pas là pour Raphaël mais bien pour Jan Fabre, puisque à cette occasion son exposition The Years of the Hour Blue cohabitait avec de grands classiques de la peinture. Le titre que Jan Fabre donna à la série Hour Blue vient des écrits de son arrière-grand-père, l'entomologue Jean-Henri Fabre, "qui a étudié le moment mystique du passage entre la nuit et le jour où les créatures nocturnes retournent se coucher et celles du jour se réveillent. Ces thèmes de métamorphose et renaissance ont inspiré le "Blue Hour", dessins au stylo à bille bleu, notamment sur papier, mais des fois sur des draps en soie de grand format ou sur des objets architecturaux à trois dimensions. Beaucoup parmi les oeuvres sont de délicats collages avec les restes conservés de corps d'insectes ou d'ailes." Donc encore une fois il s'agit de seuil et de réveil. La conscience d'un temps qui est à la fois éternel et transitoire était contenue dans l'oeuvre (par Jan Fabre comme par Raphaël) et dans la relation qui les mettait en dialogue. Un dialogue cepedant ouvert, bien que (ou parce que) La Madonna del Prato de Raphaël n'ait pas été parmi les oeuvres strictement liées à ce dialogue, puisque placeée dans l'espace et dans l'idée en dehors du réseau intentionnel des relations établies.
Toutefois, c'est là que mon déclic est arrivé, là-bas j'ai vu paysage et temps habiter des perspectives communes, les mêmes que j'ai cherchées, sur lesquelles j'ai enquêté pendant des années et qui, dans un certain sens, sont prêtes depuis toujours, puisqu'implicites dans l'acte de vivre. Puisque la vie est cet être sur deux côtés, celui du temps qui coule et celui de la création de paysages de la part des vie qui les traversent. Paysage et temps sont des dimensions réciproques. Chaque paysage existe dans le temps. Lors de cette relation entre paysage et temps, avec Refugee ce qui m'intéresse est comprendre ce qui est le corps, quelle est la ressource de sa caducité. Le corps qui, les deux - temps et paysage -, habite et traverse.
SA: Entrant dans les thématiques du projet, aussi que dans d'autres travaux précedents que vous avez réalisés - je pense par exemple à Contro la purezza dont on a parlé en 2009 - une partie importante tourne autour de l'urgence d'une action artistique entendue comme action civile. Ici, nous parlons de Hannah Arendt, évidemment, mais plus en général à une idée d'art qui, remontant aux "Grecs anciens, lie de plusieurs façon l'art à l'action. (...) activité poétique, artistique et littéraire (...) souvent pensée comme un opérer, comme un type particulier d'agir parfois plus efficace que l'agir militaire, politique, économique." (M. Perniola).
Mais ce que je voudrais analyser avec toi est ta manière spécifique d'entendre le regard sur la réalité, regard conscient, mais au but clair de "débusquer le poétique dans les plis du monde". Je voudrais parler de cette minesione poétique et de ce que tu as déjà débusqué grâce au projet Refugee.
IB: Déjà la poiesis platonicienne embrasse toute forme d'activité productive, celle capable de réveler le non-être en être. Une forme-pensée qui embrasse l'acte de création. Et avec Hannah Arendt nous sommes d'une façon définitive dans le rapport entre personne et action, c'est-à-dire l'agir expose la personne pour qui elle est, l'action la rend manifeste. Au moment de cette épiphanie de la personne dans l'action, l'action apparaît nécessaire à l'identité. Je crois que plus que les maîtres, ce sont les exemples qui sont importants. L'exemplarité est à mon avis le ressort de la connaissance qui devient de l'expérience.
Berger sur l'art, Butor sur l'engagement, Nancy sur le mutisme, Char sur la résistance: ce sont pour moi non pas des maîtres, mais des exemples de la manière dans laquelle la pensée peut se faire action se soustrayant à une part de consensus passif implicite dans la vie ordinaire. Il me vient à l'esprit cette phrase de John Berger qui dit "Je ne peux pas te dire ce que l'art fait et comment il le fait, mais je sais que souvent l'art juge les juges, demande vengeance pour l'innocent et projette vers l'avenir ce que le passé a subi, de façon qu'il ne soit jamais oublié. Je sais aussi que le puissant craint l'art dans chacune de ses formes, et des fois cet art passe parmi les gens comme une rumeur et une legende parce qu'il donne du sens à ce que la brutalité de la vie n'arrive pas à donner, un sens qui nous unifie, parce qu'au final il est inséparable de la justice. L'art, lorsqu'il fonctionne comme ça, il devient le lieu de rencontre de l'invisible, de l'irréductible, durable, la valeur et l'honneur." Dans le projet - dont le livre est partie - convergent plusieurs regroupements d'actions, de raisonnements, de résultats. C'est comme ça, par exemple, qu'un de ses chapitres consiste en le recueil de trois brèves résidences qui ont suivi l'expérience à la montagne: à Tuscania auprès de son paysage d'arrière-pays, en marchant; à Bologne, invitée de l'espace et du projet DOM au Pilastro; à Forlì, invitée du festival Crisalide par Masque Teatro. Résidences que j'ai appelées Adesso&Muto. Adesso&Muto a cherché à faire décanter la question "et maintentant?" pemettant le commencement de Refugee. Là-dedans, dans cette question présente dans le temps, l'aide a été le versant qu'à un moment donné j'ai appelé mutisme. Parce que j'ai ressenti clairement le pouvoir subversif du silence, contre l'exhibition prolixe de la parole. Mutisme non pas comme manque de parole, mais comme son sauvetage, au-delà de son excédent.
SA: En dernier, je voudrais vous demander quelque chose concernant le livre que vous avez réalisé et qui sera présenté et mis en vente et en exposition à Rimini de ces jours. Qu'est-ce qu'un livre et avec qui? Et quelles sont les étapes prochaines de ton travail après le livre?
IB: Refugee|Archivio1 est un livre d'artiste, puisqu'il altère et éteind le format livre autant qu'il a choisi des chemins insolites pour le marché éditorial en ce qui concerne le développement, les modes et le processus d'impression. Ce livre à cette phase est utilisé en tant que dispositif. Il a été imprimé en 100 exemplaires numérotés et signés, il consiste en une boîte en carton de 25 cm x 17,5 cm, et comprend des fiches de texte composé en Linotype avec polisse Garamond, imprimé en typographie sur Heidelberg Stella; outre aux textes écrits par Antonio Cipriani, Maria Nadotti et moi, il contient trois photographies par Davide Dutto, une vidéo par Luca Berardi, une carte par Erika Lazzarino et Luca Francesco Garibaldo.
Voilà le groupe impliqué dans la section du projet qui, sur mon invitation et ma coordination, a trouvé dans une portion des Alpes Occidentales de la Haute Val di Susa jusqu'à la Valle Tanaro, un lieu où se mettre à l'écoute et en marche. Les manières dans lesquelles cette section s'est déroulée sont-elles fondées sur la gratuité, jusqu'à et y compris la rencontre avec l'éditeur. Imprimées fin juillet 2012 par L'Artistica Editrice de Savigliano et avec la collaboration de Lab80 de Bergame, centre de production et distribution du cinéma documentaire expérimental, pour l'impression gratuite du dvd, les 100 copies de Refugee|Archivio1 - numérotées et signées - sont en vente dans les librairies sur demande ou directement sur le site de l'éditeur. A Rimini la Libreria Riminese de Mirco Pecci en expose un exemplaire pendant un mois, jusqu'au 16 février 2013, en le mettant à disposition de n'importe qui souhaite le lire; au mois de mars il sera exposé en tant qu'installation acoustique, avec la possibilité d'écouter des extraits, à la Bibliothèque Civique Gambalunga de Rimini. Ceux qui par contre voudront acheter le livre-coffret, ils feront aussi un geste collectif. Academies, galeries, bibliothèques, musées, universités, théâtres, lieux de petites et grandes communautés permanentes et temporaires, festivals, lieux où des rencontres et des événements s'entrelacent, espaces d'action civile. C'est à eux qui s'adresse notamment l'invitation à en penser l'achat, comme bien commun et propriété collective.
En accord avec l'éditeur, nous avons décidé de disposer de quelques copies hors commerce, identiques à celles en vente mais pas numérotées. Certaines d'entres elles ont rejoint en don des personnes qui pour nous sont de formation et de référence. D'autres copies son confiées à des témoins qui le reçoivent en lecture et en vision, et qui après le passent à d'autres personnes en suivant un fil qui se tisse de main en main. Ce parcours de connaissance a été entamé il y a quelques mois à Rimini et à Milan et il est en train de commencer à Turin, Rome, Bologne, Florence, Cesena et en France. C'est à partir de ces chaînes de lecture où les personnes se passent le livre, que les rendez-vous AROUND A TABLE, incontri intorno al tavolo naissent: il s'agit d'occasions dans lesquelles certaines personnes se recueillent autour d'une table d'une maison qui les héberge, pour s'ouvrir à una narration réciproque qui, directement ou indirectement, touche aux thèmes et aux pratiques qui ont mobilisé et qui encore mobilisent le projet Refugee dans son ensemble. Les tables décideront de se faire, ou non, elles aussi promotrices de l'achat collectif d'une copie à donner à la Bibliothèque de quartier. Selon l'endroit où ces tables nous amèneront, les étapes successives se dessineront elles aussi. Il y a deux seules choses certaines: avec ce projet des limites sont franchies et j'ai dans la tête depuis le début une section dont je ne sais pas prévoir concrètement le format - si livre ou installation ou les deux - qui s'appelle DARE PANE.
Isabella Bordoni - Performer della relazione tra scrittura, corpo e paesaggio.
Seguiamo il percorso artistico di Isabella Bordoni già da diversi anni. In un'intervista del 2009, dedicata al al suo progetto Libertà Come Bene Supremo, avviammo un dialogo sui temi della partecipazione dell'artista alla storia del proprio tempo. Oggi riprendiamo il filo di quella riflessione, spingendola un passo più avanti e aggiornandola al suo più recente lavoro Refugee. Stati d'esilio|Epifanie [2011-2014]. Parliamo dunque della specificità di un approccio che si realizza nella pratica dell'indagine, della ricerca e che illumina, adesso, nuovi risvolti del rapporto tra linguaggio e paesaggio, «per capire se corpo e paesaggio possono essere rifondati come spazio di utopia e di libertà». Il progetto Refugee è il frutto di una lunga peregrinazione.
Isabella, infatti, si è messa in cammino, e camminando, ha attraversato gli spazi dell'esperienza di persone altre e di altri corpi, vedendo in essi la traccia di una storia che può essere condivisa. Dal Montefeltro alla Val di Susa, «toccando il confine tra gli stati» questo spazio si è fatto racconto e ha preso la forma di un libro. Non solo scrittura, ma qualcosa di più, nel progetto di pubblicazione che qui raccontiamo. Entriamo dunque nell'attualità di un lavoro in fieri, quasi a parteciparvi, come l'opera stessa richiede, essendo essa costitutivamente legata alla trasmissione dei propri contenuti in uno spazio e in un tempo, ogni volta, diversi.
SA: Cominciamo dal principio: quando hai ideato il progetto Refugee. Stati d'esilio|Epifanie [2011-2014], cosa cercavi, quale traccia e se avevi già allora in mente un percorso che associasse luoghi e tematiche. IB: In principio c'è un'eccedenza e quell'eccedenza - quando davvero è tale - è un pieno che genera un vuoto. Nel caso di Refugee l'inizio si colloca nel 2010 come conseguenza dal progetto che avevo allora in corso, Contro la Purezza. Quell'inizio ha creato un anello di congiunzione tra pieno e vuoto, come un processo di svuotamento che nel lasciare un luogo chiuso e buio dove Contro la Purezza aveva chiesto di stare, cercava nell'aperto la possibilità di imparare un bilanciamento della luce e dello sguardo. L'eccedenza di allora era quella di avere lavorato a lungo intorno agli stati e ai luoghi di contenimento del corpo e di controllo della psiche. Contro la Purezza era anche questo, un lungo lavoro intorno ai resti di edifici in bilico tra rovina e monumento (luoghi tutti di contenimento ma luoghi ex, ex carcere, ex manicomio, ex campo di detenzione) che ha creato un vortice nel buio, dove la “purezza” data come ente fisso e immobile mi aveva già chiesto di muovermi con un movimento contrario. Sono stata tra la fine di un progetto e l’inizio dell’altro, dentro a un processo di svuotamento ponendomi la domanda dell'adesso. "E adesso?" Adesso che abbiamo scavato nella storia, nelle sue macerie e scabrosità, nel suo buio, nel suo chiuso, nella patografia individuale, familiare, sociale, storica, e adesso? Quella domanda non aveva risposta ed è per quella risposta che mi sono messa in cammino. Per capire in maniera evidente che la questione era ancora contraddittoria: il cammino reale, fisico, corporeo, è un atto di evasione che si compie nell’aperto. Tuttavia l’aperto non è uno spazio di libertà ma è anch’esso spazio normato. Questo poi coincideva, drammaticamente, nel 2010, con la caduta di alcune dittature dei Paesi Arabi che ha prodotto spostamenti di vite, corpi che fuoriuscivano da regimi dittatoriali ma precipitavano non meno tragicamente in un (mare) aperto che per soccorrere la vita richiede statuti di riconoscimento non in virtù del tuo essere creatura vivente, ma in nome di Stati e Nazioni. Refugee ha voluto assumere degli ambiti di riflessione, che raccolti intorno alle parole “patria” e “cittadinanza”, affrontassero la questione dei corpi. Per quanto sia possibile e giusto riassumere un progetto di cui si conosce solo una parte e di cui altra parte è in divenire, direi che Refugee è nato dall’urgenza di abitare la soglia tra parola e azione, lo spazio biopolitico dei corpi nella relazione con il linguaggio e il paesaggio, per capire se corpo e paesaggio possono essere “rifondati” come spazio di utopia e di libertà. Refugee è partito dal Montefeltro, è approdato nell'estate 2011 in Alta Val Susa, passato nell'inverno 2011 dalla Valle Tanaro ha sostato sui confini di Stati, cercato le montagne e i suoi immaginari, identità, prospettive della luce, utopie, ritorni. Nell’estate 2012 è uscito il libro d’artista che dall’inverno del 2012 sto usando come un dispositivo. Il dispositivo “libro d’artista” fa sì che un progetto di cammino si configuri ora come un progetto di piccole soste.
SA: Ti seguo da diversi anni e ho riscontrato in esso la caparbietà e la tenacia di un approccio progettuale a lungo termine, caratterizzato da complesse fasi di gestazione e tappe successive che confluiscono spesso, come nel caso del progetto attuale, in opere o pubblicazioni che, a loro volta, non chiudono, ma aprono il percorso a nuovi incontri e nuovi sviluppi. Mi piacerebbe che tu parlassi di questa necessità, dell'importanza che hanno per te il tempo e lo studio nella realizzazione di un'idea. Nei tuoi testi e nelle tue interviste hai sempre sottolineato questo fattore: la lunga durata dei progetti. Può sembrare un concetto ovvio, ma non lo è. Non c'è un'equazione data che attribuisca al processo piuttosto che all'opera d'ingegno un valore specifico, per questo non voglio dare tale percorso per scontato. Cosa vuol dire "ricerca" per te? C'è un'espressione che mi ha colpito a questo proposito, nella presentazione del lavoro Refugee: "Tra paesaggio e tempo". Cosa mi dici? IB: Sì, da diversi anni sono implicata in lunghi processi di senso. Artisticamente nasco nella scena europea delle arti multimediali e elettroniche dei secondi anni ottanta e primi anni novanta e in Italia sono sempre stata un outsider, anche quando il mio lavoro era più convenzionalmente riconosciuto nell’ambito teatrale. Ma già sul finire dell’anno 2000 ho abdicato le convenzioni produttive del teatro che chiedevano (in effetti allora più di ora, per ovvie ragioni che hanno successivamente smantellato anche quell’economia teatrale) per ogni stagione una produzione nuova. Allora, in età già piuttosto adulta, mi sono trovata davanti ad una soglia che ha richiesto un lavoro di lunga, parsimoniosa, preziosissima ricostruzione delle mie connessioni con il mondo. In quella fase, traumatica e promettente, non potevo avere fretta perché quella soglia che era anche un risveglio mi chiedeva uno sforzo immane di rieducazione alla vita. Benjamin afferma che Il risveglio è una “tecnica” del congedo dal passato; facendo del risveglio il caso esemplare del rammemorare. Qualche cosa di simile all’intendimento benjaminiano è accaduto in me, perché la prima conseguenza di quel trauma fu una sorta di amnesia e per consentire alla rammemorazione - che non è il ricordare bensì il “richiamare” alla memoria - di occupare un proprio spazio e di farlo nel nome della vita, dovevo d’altra parte trovare la forza di un congedo e con quello, anche di un nuovo atto linguistico. Un lavoro di richiamo e nominazione che chiede di morire e nascere ancora. In un processo del genere, il tempo non può esserti nemico. L’amicizia col tempo ribalta alcuni assetti e consiste in primo luogo in un abbandono della cristallizzazione dell’immagine del tempo e della storia. Questo significa potere abitare il tempo come si può abitare il luogo, ovvero individuare nel tempo la sua dimensione di paesaggio e individuare nel paesaggio la sua dimensione di tempo. A volte basta un solo click per ricongiungere con alcune caselle mancanti il puzzle che ci ha occupati per anni e iniziare a fare una sintesi, per me il click è stato rivedere in una giornata di grande assorbenza visiva, al Kunsthistoriches Museum di Vienna un dipinto di Raffaello. Ma questo rivedere - vedere una seconda volta - non è un’azione neutra, tutt’altro e anche in quel caso è stato il frutto di un’ibridazione. Infatti non ero lì per Raffaello ma per Jan Fabre, poiché in quell’occasione la sua esposizione The Years of the Hour Blue coabitava con alcuni grandi classici della pittura. Il titolo che Jan Fabre diede alla serie Hour Blue deriva dagli scritti del suo bisnonno, l’entomologo Jean-Henri Fabre, “che ha studiato il momento mistico d passaggio tra la notte e il giorno in cui le creature notturne tornano a dormire e quelle diurne si svegliano. Questi temi di metamorfosi e rinascita hanno ispirato il "Blue Hour" disegni che sono fatti con una penna a sfera blu, soprattutto sulla carta, ma a volte su lenzuola di seta di grandi dimensioni o oggetti architettonici tridimensionali. Molte delle opere sono delicati collage con i resti conservati di corpi di insetti o ali.” Ancora quindi, si tratta di soglia e di risveglio. Quindi la consapevolezza di un tempo che è insieme eterno e transitorio, era contenuta sia nell’opera (di Jan Fabre come di Raffaello) sia nella relazione che li metteva in dialogo. Dialogo comunque aperto, benché (o poiché) La Madonna del Prato di Raffaello non fosse tra le opere strettamente legate a quel dialogo, perché collocata spazialmente e ideologicamente fuori dalla rete intenzionale delle relazioni stabilite. E tuttavia è lì che è accaduto il mio click, lì ho visto paesaggio e tempo abitare delle prospettive comuni, le stesse che ho cercato e indagato per anni e che in un certo senso sono pronte da sempre, perché implicite all’atto del vivere. Poiché la vita è questo stare su due fronti, quello del tempo che scorre e quello della creazione di paesaggi da parte delle vite che li attraversano. Paesaggio e tempo sono dimensioni reciproche. Ogni paesaggio accade temporalmente. In questa relazione tra paesaggio e tempo, con Refugee mi interessa capire cosa è il corpo, quale la risorsa della sua caducità. Il corpo che entrambi – tempo e paesaggio – abita e attraversa.
SA: Entriamo nelle tematiche del progetto. Come in altri tuoi lavori precedenti - penso ad esempio a Contro la purezza di cui parlammo nel 2009 - fai riferimento all'urgenza di un azione artistica intesa come azione civile. Qui ci riferiamo ad Hannah Arendt, naturalmente, ma più in generale ad un'estetica che, risalendo ai “Greci antichi, collega in vari modi l’arte all’agire. (…) attività poetica, artistica e letteraria (…) spesso pensata come un operare, come un tipo particolare di azione talvolta più efficace che quella militare, politica, economica.” (M. Perniola) Ma ciò che vorrei con te analizzare è il tuo specifico modo di intendere lo sguardo sulla realtà, sguardo partecipe, sì, ma con il particolare obiettivo di “stanare il poetico nelle pieghe del mondo”. Vorrei parlare allora di questa dimensione poetica e di ciò che hai stanato con il progetto Refugee. IB: Già la poiesis platonica abbraccia ogni forma di attività produttiva, che sia in grado di rivelare il non-essere in essere. Una forma-pensiero che abbraccia l’atto di creazione. E con Hannah Arendt siamo in maniera definitiva nel rapporto tra persona e azione, ovvero l’agire espone la persona per chi è, la rende manifesta. In questa epifania della persona nell’azione, l’azione appare necessaria all’identità. Io credo che più dei maestri, siano importanti gli esempi. L’esemplarità è secondo me la molla della conoscenza che diventa esperienza. Berger sull’arte, Butor sull’impegno, Nancy sul mutismo, Char sulla resistenza, sono per me non maestri ma esempi, di come il pensiero possa farsi azione nel sottrarsi ad una quota di consenso passivo implicito nella vita ordinaria. Mi viene in mente questa frase di John Berger che dice “Non posso dirti quello che l’arte fa e come lo fa, ma so che spesso l’arte processa i giudici, chiede vendetta per l'innocente e proietta verso il futuro quello che ha subito il passato, in modo che non sia mai dimenticato. So anche che il potente teme l’arte in ognuna delle sue forme, ed a volte questa arte passa tra la gente come una diceria e una leggenda perché dà senso a ciò che la brutalità della vita non riesce a dare, un senso che ci unifica, perché alla fine è inseparabile dalla giustizia. L’arte, quando funziona così, diventa il luogo di incontro dell’invisibile, dell’irriducibile, durevole, il valore e l’onore”. Nel progetto - di cui il libro è parte - convergono più raggruppamenti di azioni, ragionamenti, esiti. Così ad esempio accade che uno dei suoi capitoli siano le brevi residenze che hanno seguito l'esperienza di montagna, un ciclo breve di tre residenze: a Tuscania presso il suo paesaggio d’entroterra, in cammino; a Bologna ospite dello spazio e del progetto DOM al Pilastro; a Forlì ospite del festival Crisalide di Masque Teatro. Residenze che ho chiamato Adesso&Muto. Adesso&Muto ha cercato di fare decantare quella domanda “e adesso?” da cui Refugee ha avuto inizio. Lì, in quella domanda presente nel tempo, d’aiuto è stato un versante che a un tratto ho chiamato mutismo. Perché ho avvertito con chiarezza il potere sovversivo del silenzio, contro l’esibizione logorroica della parola. Mutismo non come mancanza di parola ma come suo salvataggio, oltre la sua eccedenza.
SA: In ultimo, vorrei chiederti qualcosa riguardo il libro che hai realizzato e che viene presentato e messo in vendita e in mostra a Rimini proprio in questi giorni. Cos'è un libro; perché un libro e con chi! E quali sono le prossime tappe del tuo lavoro. IB: Refugee|Archivio1 è un libro d’artista, sia perché altera e amplia il formato libro, sia perché per sviluppo, modalità e procedimento di stampa, ha scelto vie del tutto insolite per il mercato editoriale. Questo libro in questa fase viene usato come un dispositivo. Stampato in 100 esemplari numerati e firmati, consiste in un box cartonato di 25 cm x 17,5 cm, comprende cartelle di testo composto in Linotype con carattere Garamond, stampato in tipografia su Heidelberg a stella; oltre ai testi scritti da me, Antonio Cipriani, Maria Nadotti, contiene tre fotografie di Davide Dutto, un video di Luca Berardi, una mappa di Erika Lazzarino e Luca Francesco Garibaldo. Questo il gruppo coinvolto nella sezione del progetto, che su mio invito e coordinamento, ha trovato in una porzione delle Alpi Occidentali dall'Alta Val Susa alla Valle Tanaro, un luogo dove mettersi in ascolto e in cammino. Le maniere nelle quali si è svolta questa sezione del progetto sono fondate sulla gratuità, fino e incluso l’incontro con un editore. Stampate a fine luglio 2012 da L’Artistica Editrice di Savigliano e con la collaborazione di Lab80 di Bergamo, centro di produzione e distribuzione del cinema documentario sperimentale, per la stampa gratuita del dvd, le 100 copie di Refugee|Archivo1 numerate e firmate, sono in vendita nelle librerie su richiesta o direttamente al sito dell’editore1. A Rimini la Libreria Riminese di Mirco Pecci lo espone per un mese, fino al 16 febbraio 2013, mettendolo a disposizione di chiunque desideri leggerlo, mentre per tutto il mese di marzo sarà esposto come installazione anche acustica, con la possibilità di ascoltare parte dei test, alla Biblioteca Gambalunga di Rimini. Chi invece potrà e vorrà comprare il libro-cofanetto farà un gesto anche collettivo. Accademie, gallerie, biblioteche, musei, università, teatri, luoghi di piccole e grandi comunità permanenti o temporanee, festival, luoghi dove si intrecciano incontri ed eventi, spazi di azione civile, a loro soprattutto si rivolge l’invito a pensarne l’acquisto come bene comune e proprietà collettiva. D’accordo con l’editore abbiamo deciso di disporre di alcune copie fuori commercio, identiche a quelle in vendita ma non numerate. Alcune di queste hanno raggiunto in dono alcune persone che per noi sono di formazione e riferimento. Altre copie sono affidate a testimoni che lo ricevono in lettura e in visione e che poi lo passano ad altre seguendo un filo che si tesse di mano in mano. Questo percorso di “conoscenza” è stato avviato un paio di mesi fa a Rimini e a Milano e sta iniziando a Torino, Roma, Bologna, Firenze, Cesena e in Francia. Da queste catene di lettura dove le persone se lo passano di mano in mano, nascono gli incontri AROUND A TABLE, incontri intorno al tavolo, occasioni nelle quali alcune persone si raccolgono intorno al tavolo di una casa che le ospita, per aprirsi ad una narrazione reciproca che, direttamente o indirettamente, tocca i temi e le pratiche che hanno mosso e che ancora muovono il progetto Refugee nel suo insieme. I tavoli poi decideranno se anche loro farsi promotori dell’acquisto collettivo di una copia da donare alla Biblioteca di zona. A seconda di dove ci porteranno questi tavoli, si delineeranno anche le tappe successive. L’unica cosa certa è che con questo progetto si varcano dei confini e che ho in mente fin dall’inizio una sezione di cui non so prevedere con concretezza il formato – se libro o installazione o entrambi – che si chiama DARE PANE
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