Tindaro Granata, jeune artiste d'origine sicilienne, vit actuellement à Milan. Après avoir gravi les échelons pendant 15 ans, il a enfin réalisé ses rêves.
SA: Nous savons que tu viens de rentrer de Suisse. Comment ça s'est passé?
TG: Magnifique pour l'accueil que j'ai reçu. Même s'ils étaient tous de vrais suisses, pas des émigrés de la deuxième génération, j'ai trouvé une attention et une affection très belle et inattendue. J'ai mis en scène Antropolaroid.
SA: Entrons dans le vif de ce spectacle, que nous de SuccoAcido avons beaucoup aimé et qui nous a frappé énormément par sa force expressive. Tu nous racontes comment est-il né?
TG: Il s'agit de l'histoire de ma famille, même si elle est un peu romancée. En 1921 mon arrière grand-père s'est suicidé car il a découvert qu'il avait un cancer et, puisqu'à l'époque c'était impossible de le soigner, il décida de mourir pour ne pas peser sur sa famille. Soixante-dix ans après, mon meilleur ami, lorsqu'il apprit que j'allais quitter la Sicile, se suicida lui aussi, comme mon arrière grand-père. Entre ces deux épisodes noirs, il y a une explosion de vie et de joie de vivre dans tous les autres personnages de l'histoire. Dans le spectacle il y a beaucoup de personnes de ma famille, il y a toute ma vie. Certaines choses je les ai prises justement de ma famille, d'autres de familles qui sont proches de moi.
SA: Antropolaroid est un nom curieux, quelle est son origine?
TG: Cristina Pezzoli avait créé un groupe qui s'appelait «PPP» Pornographie, Politique, Pouvoir, avec l'idée de mettre en scène des spectacles qui traitaient ces sujets. Elle nous avait demandé de faire un exercice, une forme de présentation: chacun d'entre nous devait se présenter aux autres pour qu'on commence à faire une analyse de l'évolution de la société italienne dans les derniers 100 ans. Le spectacle est né de là; moi je me souvenais de mon arrière grand-père, donc j'ai commencé avec son histoire. J'ai écrit toute la première moitié du spectacle en une nuit, évidemment, j'avais besoin de le faire. Mon intention était de créer une photographie instantanée des mes aînés. J'ai pris quelques choses de ma famille, je ne suis pas un imitateur, j'ai cherché à recréer des sensations, des gestuelles, j'ai copié des regards qu'ils avaient et puis j'ai créé les personnages. Au début c'était douloureux, quand j'ai écrit le spectacle, mais après, dès que j'ai mis en scène les personnages, ça ne l'a plus été, au contraire, chaque fois que je joue je pense à tous avec affection et joie, c'est comme s'ils étaient présents avec moi sur le plateau.
SA: On parlait de force: en effet beaucoup de l'énergie que ce spectacle communique au public, en en retenant le souffle, est donnée par ton style de jeu, par le choix d'interpréter toi-même tous les personnages, dans un fleuve de récits qui se chevauchent sans narrer. Ta grand-mère, ton père, chaque personnage apparait directement sur scène, juste introduit par toi qui es comme possédé par eux.
TG: Contrairement à un spectacle de narration classique, dans Antropolaroid les personnages ne viennent pas racontés à la troisième personne, mais ils parlent entre eux; il y a de vrais dialogues entre les personnages, chacun interprété par moi. Le spectateur assiste à ce que mon grand-père et ma grand-mère se sont dit la première fois qu'ils se sont rencontrés, ou encore à ce que mon père a dit à ma grand-mère le jour où il a émigré de Sicile, etc. Donc le spectateur voit l'histoire, elle n'est pas racontée, mais il assiste aux événements. Je suis le seul acteur en scène et je joue tous les rôles, donc cela pourrait sembler difficile, mais pour moi ça ne l'est pas, parce qu'il suffit de quelques lignes d'un dialogue, de peu de mots, pour communiquer une sensation ou une émotion que les personnages sont en train de vivre à un certain moment.
SA: À quel théâtre t'es-tu inspiré dans ton parcours? Quels sont tes références principales, aussi pour Antropolaroid?
TG: Je ne me suis pas inspiré d'un modèle précis, j'ai cherché, et je cherche à chaque fois que je veux mettre en scène un spectacle, à me laisser toucher de toutes les choses belles que j'ai vu et que je vois, soit au cinéma soit au théâtre. C'est la beauté qui me donne le désir de faire du théâtre. Pour Antropolaroid, je me suis inspiré d'un film: Matrimonio all'italiana, que je considère comme un chef d'oeuvre de jeu. Il n'y a pas une source théâtrale qui m'a inspiré pour Antropolaroid, mais certains acteurs m'ont ouvert la route ; par exemple Elisabetta Pozzi, que j'ai vu dans Medée, qui m'avait touché au coeur lorsqu'elle se retourne d'un coup, et, tout en jouant, se transforme en Jason. Mais aussi Saverio La Ruina, qui, dans Dissonorata, m'a fait croire d'être dans le monde qu'il était en train de raconter. Ces épisodes étaient l'incipit de mon spectacle: moi qui joue des hommes et des femmes sur scène et moi qui raconte et cherche à faire revivre mon monde au public. Tout cela se passait avant que j'emménage à Milan. Maintenant ici, dans la ville du théâtre italien, je vois beaucoup de spectacles merveilleux. Mes références sont les compagnies et les artistes de Milan qui font l'histoire de cette ville, et pas seulement d'elle.
SA: Un autre élément fondamental dans Antropolaroid est la langue et le rapport avec le dialecte, langue maternelle des personnages, que tu alternes avec l'italien. As-tu traduit quelque chose du langage des personnages? Dans quelle mesure l'adaptes-tu à la narration? Enfin, quelle valeur a pour toi ce choix linguistique au théâtre?
TG: Un spectacle qui parle des origines de foyers familiaux ne peut que parler un dialecte. Pour moi c'est fondamental, pour rendre la vérité des personnages et l'histoire que je raconte. Le spectacle commence avec un dialecte très ancien, qui utilise le verbe être dans le latin est. J'utilise souvent une déformation de l'italien, parfois je le fais inconsciemment, parce que c'est comme si l'utilisation d'une «impureté» linguistique me donnait une capacité plus forte d'exprimer le concept que je veux faire passer. Evidemment cela est applicable aux personnages que moi je pourrais écrire. Chaque auteur a son style et chaque personnage a sa façon et sa nécessité d'expression. Quand je joue j'adapte légèrement le spectacle. Si je me trouve dans le nord, je l'italianise un peu plus, si je suis dans le sud j'insiste sur le dialecte. J'aime penser que les spectacles respirent aussi en fonction du lieu où ils sont joués.
SA: Il y a un autre spectacle qui a fait parler de toi, Invidiatemi come io ho invidiato voi ("Enviez-moi comme moi je vous ai envié"). Cela aussi est un titre particulier, au ton personnel, mais qui se réfère cette fois-ci à un sujet social très difficile comme celui de la pédophilie. De quelle manière l'as-tu traité?
TG: Invidiatemi come io ho invidiato voi naît de mon urgence à vouloir analyser un mal de vivre qu'est la pédophilie, une attitude terrifiante, sûrement une maladie. J'avais su d'un cas en regardant la télé, cela m'a inspiré et convaincu que je devais écrire quelque chose sur ce sujet. Évidemment ce cas a été seulement un prétexte pour parler d'autre chose, mais j'avais été frappé par ce que j'avais entendu. Cela m'avait beaucoup touché dans la manière de parler de la petite fille, comme si ses deux ans et demi de vie n'étaient pas importants. Dans le spectacle l'enfant est la seule dont on ne dit jamais le prénom, ce qui m'intéressait était de chercher à comprendre les comportements des personnages autour de la petite, donc du foyer familial: la maman, le papa, la grand-mère, la belle-soeur, la voisine, le pédophile et une amie de la mère. Contrairement à Antropolaroid, ce spectacle implique aussi d'autres acteurs. Dans ce cas, je ne pouvais pas me limiter à évoquer les personnages. En scène j'interprète le père de l'enfant, que la mère confiait à son amant pour qu'elle s'habitue à sa présence. Mais il s'avère que l'homme est un pédophile, il abuse de la petite jusqu'au point de la tuer. Le juge condamnera aussi la mère en la considérant comme consciente de sa condition de malade.
SA: Récemment tu as reçu un prix prestigieux, le prix Mariangela Melato comme acteur émergent, qu'est-ce que cela t'a fait?
TG: Le prix Mariangela Melato m'a été donné par l'association dont ils font partie et par la soeur de l'actrice, Anna Melato, et d'autres personnalités importantes, aussi Elio De Capitani et Ferdinando Bruni, directeurs du théâtre Elfo Puccini. On m'a dit, après, que l'intention était de donner le prix à un artiste émergent qui avait des caractéristiques particulières. Il parait, en effet, que quand Mariangela Melato a commencé sa carrière cinématographique, Sophia Loren a dit que pour sa particularité elle pouvait être définie "une picassa". L'idée du prix est donc de récompenser un jeune artiste qui sortirait des codes traditionnels, un peu comme Mariangela Melato à son époque. Certes, si j'avais seulement un peu de Mariangela Melato je serais un très grand acteur. Une occasion importante est venue de Ferdinando Bruni, qui a vu mon spectacle en avant-première et, avec Elio De Capitani, l'a voulu à l'Elfo Puccini. Ensuite ils m'ont voté pour la remise des prix. Avec moi, Valentina Picello a été récompensée comme artiste féminin, je la connaissais déjà parce que j'allais voir ses spectacle, elle est géniale. Tous les deux nous avons un parcours sui generis. Moi je n'ai pas fait d'école et Antropolaroid, par exemple, est extrêmement personnel, et ne peut appartenir qu'à moi. C'est Anna Melato qui m'a communiqué par téléphone que j'avais gagné le prix et déjà pour ça j'étais très ému, mais quand elle m'a dit que la remise des prix aurait lieu le 5 septembre, j'étais aux anges et j'ai commencé à pleurer comme un idiot. Le 5 septembre c'est le jour de mon anniversaire. En un instant j'ai vu passer devant mes yeux toute ma vie; je me suis rappelé de beaucoup de jours tristes. Le jour de mes 20 ans je m'étais embarqué comme marin sur un navire et j'ai passé mon anniversaire au milieu de la mer, tout seul. Je pleurais, je voulais être acteur déjà à l'époque, mais j'étais sur un navire, seul et effrayé. Je me rappelle d'une scène de moi assis dans la salle des machineries, dans la partie basse du navire, avec les moteurs allumés qui faisaient tourner l'hélice. Après 15 ans, après tant de souffrance, de sacrifices, j'allais me retrouver au théâtre San Carlo de Naples pour recevoir le prix Mariangela Melato. Laisser ma terre et mes amis n'a pas été facile, mais ce prix a récompensé beaucoup de larmes versées pour réaliser mes rêves. J'ai téléphoné tout de suite aux personnes que j'aime et aux personnes qui m'ont aidé. C'était beau: je pleurais et riais.
SA: Tu es un garçon qui a eu de la chance, mais que pourrait-on faire pour améliorer la situation au-delà du cas particulier?
TG: Aujourd'hui en Italie il n'est pas facile de faire du théâtre et de vivre seulement de ce métier, moi j'ai eu beaucoup de chance jusqu'à maintenant, parce que mon spectacle a été acheté par beaucoup de théâtres et ils m'ont tous traité avec une grande attention. C'est très difficile de travailler et vendre les spectacles parce que les théâtres n'ont plus d'argent pour pouvoir acheter, et les propositions sont très nombreuses. C'est plus facile d'ouvrir les théâtres aux personnages connus qu'à des inconnus. Je me sens comme un privilégié et je suis conscient que la plupart de mes collègues n'ont pas les mêmes possibilités. Il y a des festivals de théâtre qui mettent au programme seulement des noms très connus et de la télé. Malheureusement, en faisant ainsi, le public s'habitue à ne pas être attentif aux jeunes. Selon moi, il y a très peu d'artistes aujourd'hui qui arrivent à faire du théâtre, du cinéma et de la télé au même niveau, et je me rends compte que beaucoup de théâtres investissent sur des choses déjà vues donc des billets surement vendus. Peut-être qu'ils s'abaissent à des compromis économiques ? Je ne sais pas, mais cette époque ne devrait pas être une époque de compromis. Les grands théâtres devraient ouvrir leur portes aux jeunes. Naturellement les petits contextes le font déjà, mais les grands théâtres qui ont des affluences importantes de spectateurs ? Non ! Je peux parler de mon expérience personnelle: le théâtre Elfo Puccini l'a fait, en 2011, en inaugurant une saison entièrement consacrée aux nouveaux talents. C'était un cycle intitulé «Nouvelles Histoires», où il y avait des jeunes inconnus auxquels a été donnée la possibilité de débuter ou de mettre en scène son propre travail dans un théâtre de grande importance, moi j'étais parmi eux. Chaque théâtre publique devrait réserver le 50% des spectacles aux nouvelles propositions. Pour l'instant il n'y a que les spectacles produits par les théâtres publiques qui tournent, je souhaiterais que la loi sur les "échanges" entre institutions soit abolie. Il existe de beaux exemples dont j'aimerais parler, qui sont tous les petits festivals ou les petits théâtres, les centres et les communes où j'ai mis en scène Antropolaroid, il y en a beaucoup, vraiment, et je ne voudrais pas en oublier quelques uns. Si on a envie de faire une chose on la fait et ceux qui ont le pouvoir de décider devraient le faire. En Sicile, le théâtre grecque de Tindari est très mal géré par la Commune de Messine. Mon village, Patti, et la jeune Directrice Artistique, Anna Ricciardi, ne peuvent pas gérer le Théâtre Grecque à cause de la bureaucratie et des politiques qui occupent les postes au sommet de la province et de la région, et qui à mon avis sont culturellement inutiles, inaptes et inadéquates. Moi-même je me suis proposé pour le prendre en gestion il y a quelques années, mais on ne m'a pas donné la possibilité de le faire.
SA: Tu as souligné l'importance du facteur économique, en indiquant comment l'achat du spectacle et l'investissement de la part des théâtres fait la différence. Selon toi, pourquoi les théâtres ont choisi ton spectacle, au-delà de la chance? Et, surtout, qu'est-ce que cela signifie de faire un spectacle sans une production?
TG: Oh mon dieu, quelle question… je ne saurais pas dire, peut-être parce qu'Antropolaroid parle d'une famille et que l'Italie a été fondée avec le concept de famille… je sais pas… On a tous aimé et subi cette microsociété qu'est la famille, donc un spectacle qui en parle de façon étrange, avec un acteur qui joue tous les rôles et qui parle le dialecte et qui coûte peu… un ensemble de tout ça. Un spectacle sans production non seulement signifie pas d'argent, ce qui est déjà un problème, mais ça signifie que les acteurs doivent tout faire, vraiment tout, et c'est très difficile. Il faut organiser la salle de répétitions, les convocations des acteurs, les techniciens, tout ce qui sert pour les répétitions, les arrivées sur le lieu, les montages, les démontages, les fiches de paie, les affiches, les contacts avec les théâtres… c'est très fatiguant et souvent les acteurs ou les metteurs en scène sans production s'occupent plus d'organiser le tout plutôt que de jouer.
SA: Tu aimerais retourner en Sicile?
TG: Quand j'entends parler en sicilien je commence moi aussi à le parler, tu vois comme ma terre me manque. Mais le chez soi c'est là où l'on t'ouvre les portes et où tu te sens bien. J'aimerais rentrer en Sicile, mais ce n'est pas une terre qui protège ses artistes. Il suffit de penser à Emma Dante, reconnue par les institutions de Palerme seulement maintenant même si elle est une artiste internationale. J'espère que les choses vont changer, avec la nouvelle direction du Théâtre Biondo à Palerme, ou à Messine, avec les jeunes de la salle Laudamo, et avec tous les jeunes qui cherchent à reprendre en main notre terre ; il y a des jeunes qui disent «nous sommes là et nous voulons notre Sicile!». Vue la situation, peut-être que c'est juste d'auto-gérer le théâtres et se rapproprier de notre culture, on jette ce qui est vieux, mais en évitant de créer les mêmes dynamiques des vieux parasites. Malheureusement, dans la plupart des cas, en Sicile, le système de gestion du théâtre est malade et, même si j'aimerais y retourner, ici à Milan je me sens chez moi. À Milan on m'a ouvert les portes et pour ça je me sens chez moi.
Tindaro Granata
Tindaro Granata, giovane artista di origini siciliane vive attualmente a Milano. Dopo 15 anni di gavetta ha finalmente raggiunto i suoi sogni.
SA: Sappiamo che sei appena tornato dalla Svizzera. Com’è andata?
TG: Stupenda per l’accoglienza che ho avuto. Nonostante fossero tutti Svizzeri veri, non emigrati di seconda generazione, c’è stata un’attenzione e un affetto totalmente inaspettato e molto bello. Ho portato in scena Antropolaroid.
SA: Entriamo nel vivo di questo spettacolo, che noi di SuccoAcido abbiamo amato e che ci ha colpito molto per la sua forza espressiva. Vuoi dirci come nasce?
TG: Si tratta della storia della mia famiglia, anche se un po’ romanzata. Nel 1921 il mio bisnonno si suicidò perché scoprì di avere un tumore e, poiché all’epoca non era possibile curarlo, decise di togliersi la vita per non gravare sulla famiglia. Settant’anni dopo il mio migliore amico, saputo che mi trasferivo dalla Sicilia, si suicidò anche lui, come il mio bisnonno. In mezzo a questi due episodi neri c’è un’ esplosione di vita e gioia degli altri personaggi della storia. Nello spettacolo ci sono tanti miei familiari, c’è tutta la mia vita. Alcune cose le ho prese proprio dalla mia famiglia, altre dalle famiglie che mi erano vicine.
SA: Antropolaroid è un nome curioso, qual è la sua origine?
TG: Cristina Pezzoli, alcuni anni fa, aveva creato un gruppo di nome "PPP" Pornografia, Politica, Potere; con l’idea di mettere in scena degli spettacoli che trattassero questi argomenti. Ci chiese di fare un esercizio, una forma di presentazione: ognuno di noi partecipanti doveva presentare se stesso per iniziare un’analisi dell’evoluzione della società italiana degli ultimi 100 anni. Lo spettacolo è nato da lì; io avevo memoria del mio bisnonno, quindi ho iniziato proprio con la sua storia. Ho scritto la prima parte dello spettacolo in una notte, evidentemente, avevo bisogno di farlo. L’intenzione era che si trattasse di un’istantanea delle persone venute prima di me. Della mia famiglia ho preso alcune cose, non sono un imitatore, ho cercato di ricreare delle sensazioni, delle gestualità, ho copiato degli sguardi che facevano queste persone reali e poi ho creato i personaggi. All’inizio è stato difficile, quando ho scritto lo spettacolo, ma poi, appena ho messo in scena i personaggi, non lo è stato più, anzi, ogni volta che vado in scena penso a tutti loro con affetto e gioia, è come se fossero presenti con me sul palco.
SA: Parlavamo di forza, in effetti molta dell’energia che questo spettacolo comunica al pubblico - tenendolo realmente col fiato sospeso, è data dal tuo stile di recitazione, dalla tua scelta di interpretare tu stesso tutti i personaggi in un fiume di narrazioni che si accavallano senza narrare. Tua nonna, tuo padre, ciascuno compare direttamente in scena, appena introdotto da te, che ne vieni come posseduto.
TG: A differenza di uno spettacolo di narrazione classica, in Antropolaroid, i personaggi non vengono raccontati in terza persona, ma parlano tra di loro; ci sono dei veri e propri dialoghi tra personaggi, ognuno dei quali è interpretato da me. Lo spettatore assiste a quello che mio nonno e mia nonna si dissero la prima volta che si incontrarono, oppure a ciò che mio padre disse a mia nonna il giorno in cui emigrò dalla Sicilia etc etc. Lo spettatore vede la storia che non viene raccontata, assiste ai fatti. Sono l’unico attore in scena e faccio tutti i ruoli, quindi potrebbe sembrare complicato, ma per me non lo è perché bastano poche righe di un dialogo, poche parole, per comunicare una sensazione o un’emozione che vivono i personaggi in quel momento.
SA: A quale teatro ti sei ispirato nel tuo percorso? Quali sono i tuoi riferimenti principali, anche per Antropolaroid? TG: Non c’è un preciso modello a cui mi sono ispirato, ho cercato e cerco ogni volta che voglio mettere in scena uno spettacolo, di farmi suggestionare da tutte le cose belle che ho visto, sia al cinema che in teatro. È la bellezza che mi da il desiderio di fare. Per Antropolaroid mi sono ispirato ad un film : Matrimonioall’italiana, che considero un capolavoro. Una fonte teatrale che mi abbia ispirato non c’è, ma alcuni attori mi hanno aperto delle strade, per esempio Elisabetta Pozzi che vidi nella Medea e mi colpì al cuore quando ad un certo punto si girò e, recitando, da Medea diventò Giasone; oppure Saverio La Ruina che in Dissonorata mi fece credere di essere in quel mondo che stava raccontando. Questi episodi sono stati l’incipit del mio spettacolo: io che faccio maschi e femmine in scena e io che racconto e cerco di far rivivere il mio mondo al pubblico. Tutto questo accadeva prima che mi trasferissi a Milano, che è la “città del teatro” italiano, adesso vedo tanti spettacoli, alcuni bellissimi. I miei punti di riferimento sono le compagnie e gli artisti di Milano che fanno la storia di questa città, e non solo.
SA: Altro elemento fondamentale in Antropolaroid è la lingua e il rapporto con il dialetto, lingua madre dei personaggi, che tu intervalli all’italiano. Hai tradotto qualcosa del linguaggio dei personaggi, in quale misura lo adatti alla narrazione? Che valore ha, infine, per te questa scelta linguistica in teatro?
TG: Uno spettacolo che parla di famiglie e parte dalle origini dei nuclei famigliari non può non parlare un dialetto. Per me è fondamentale per restituire la verità dei personaggi e delle storie che racconto. Lo spettacolo inizia con un dialetto molto antico che usa il verbo essere in latino est. Nei miei spettacoli utilizzo spesso una storpiatura dell’italiano, a volte lo faccio inconsapevolmente, perché è come se l’uso di una “sporcatura” linguistica mi desse maggior capacità di esprimere il concetto che voglio far passare. Ovviamente questo è applicabile ai personaggi che scrivo io. Ogni autore ha il suo stile e propri personaggi hanno il loro modo e la loro necessità di espressione. Adatto leggermente lo spettacolo al luogo in cui recito, se mi trovo nel profondo nord lo italianizzo di più, se mi trovo all’estremo sud, calco la mano, come si suol dire. Mi piace pensare che gli spettacoli respirino anche in base a dove vengano rappresentati.
SA: C’è un altro spettacolo che ha fatto parlare di te, Invidiatemi come io ho invidiato voi. Anche questo è un titolo particolare, dal tono personale, ma che si riferisce stavolta ad un tema sociale molto difficile, come la pedofilia. In che modo lo hai affrontato?
TG: Invidiatemi come io ho invidiato voi nasce dalla mia esigenza di voler analizzare un male di vivere che è la pedofilia, un atteggiamento terribile, sicuramente una malattia. Avevo avuto notizia di un caso, guardando la tv, che mi ha ispirato e convinto che avrei scritto qualcosa su questo tema. Ovviamente il caso fu solo un pretesto per parlare di altro; rimasi molto scosso per quello che avevo sentito raccontare, mi aveva molto toccato come si parlava della bambina in questione, quasi come se i suoi due anni e mezzo di vita non fossero importanti. Nello spettacolo la bambina è l’unica di cui non si dice mai il nome. Mi interessava cercare di capire gli atteggiamenti dei “personaggi intorno” alla bambina, quindi del nucleo familiare: la mamma, il papà, la nonna, la cognata, la vicina di casa, il pedofilo e un’amica della madre. A differenza di Antropolaroid questo spettacolo coinvolge anche altri attori. In questo caso non potevo limitarmi ad evocare i personaggi. In scena io interpreto il padre della bimba, che la madre affidava al suo amante per abituarla a lui. Ma accade che l’uomo si rivela un pedofilo, abusando della bimba fino al punto di ucciderla. Il pm condannerà anche la madre ritenendola consapevole della condizione di malato dell’amante.
SA: Di recente hai ricevuto un premio prestigioso, il premio Mariangela Melato come attore emergente, che effetto ti ha fatto?
TG: Il premio Mariangela Melato mi è stato dato dall’associazione di cui fanno parte, oltre alla sorella dell’attrice, Anna Melato, altre persone illustri, tra i quali Elio De Capitani e Ferdinando Bruni, direttori del teatro Elfo Puccini. Mi è stato detto dopo che l’intenzione era di premiare un artista emergente che avesse delle caratteristiche particolari. Sembra infatti che quando la Melato iniziò la sua carriera cinematografica, Sofia Loren disse che per la sua particolarità, poteva essere definita “una picassa". L’idea del premio, quindi, è di premiare un giovane artista che esca dai canoni tradizionali, un po’ come lo era la Melato ai suoi tempi. Certo è che se ne avessi un pelo della Melato, sarai un grandissimo artista. L’occasione bella e importante me l’ha data Ferdinando Bruni, che ha visto il mio spettacolo in anteprima e l’ha voluto con Elio De Capitani all’Elfo Puccini e poi mi hanno votato per la premiazione. Insieme a me, come artista femminile, è stata premiata Valentina Picello, che io conoscevo perché andavo a vedere i suoi spettacoli, è bravissima lei. Entrambi abbiamo un percorso sui generis. Io non ho fatto una scuola e Antropolaroid, per esempio, è in chiave estremamente personale, può appartenere solo a me. È stata proprio Anna Melato a comunicarmi telefonicamente che avevo vinto il premio e già per questo io ero molto emozionato, ma quando mi ha detto che la premiazione sarebbe stata il cinque settembre, non ci ho visto più dalla gioia e ho iniziato a piangere come un bimbo. Il cinque settembre è il giorno del mio compleanno. In un attimo mi è passata davanti tutta la mia vita; ho ricordato i giorni tristi. Il giorno del mio ventesimo compleanno, il 5 settembre del 1998, ero imbarcato come marinaio su una nave e trascorsi il compleanno in mare, da solo. Piangevo, volevo fare l’attore già allora, ma ero su una nave, solo e spaventato. Ricordo la scena di me seduto a piangere in sala macchinari, nella parte bassa della nave, con i motori accesi che facevano girare l’elica. Esattamente dopo 15 anni, dopo tante sofferenze, sacrifici, mi sarei ritrovavo al San Carlo di Napoli a ritirare il premio Mariangela Melato. Lasciare la mia terra e i miei amici non è stato facile, ma questo premio ha ricompensato tante lacrime versate per raggiungere i miei sogni. Telefonai subito dopo alle persone che amo e che mi hanno aiutato in tutto. È stato bello: piangevo e ridevo.
SA: Tu ti definisci un ragazzo fortunato, ma cosa si potrebbe fare per migliorare la situazione degli attori al di là del caso particolare?
TG: Oggi in Italia non è semplice fare teatro e vivere solo di questo mestiere, io sono stato molto fortunato, fino ad oggi, perché il mio spettacolo è stato acquistato da molti teatri e tutti mi hanno trattato con grande cura e affetto. È difficilissimo lavorare e vendere gli spettacoli perché i teatri non hanno più i soldi per poter produrre e inoltre le proposte sono tantissime. È più facile aprire i teatri ai personaggi famosi che a degli sconosciuti. Io mi sento un privilegiato e sono consapevole che la maggior parte dei miei colleghi non lo è altrettanto. Ci sono rassegne teatrali che mettono in cartellone solo nomi conosciuti e televisivi. Purtroppo, facendo così, il pubblico si abitua a non prestare attenzione ai giovani. Secondo me sono pochissimi, oggi, gli artisti che riescono a fare teatro, cinema e televisione allo stesso livello e mi rendo conto che molti teatri investono sulle cose già viste e sicuro sbigliettamento. Forse scendono a compromessi economici? Non so, ma questa non dovrebbe essere un’epoca di compromessi. I grandi teatri dovrebbero aprire le porte ai giovani. Ovviamente le piccole realtà già lo fanno, ma i grandi teatri che hanno grandi affluenze di spettatori? No! Posso parlare per la mia esperienza personale: il teatro Elfo Puccini lo ha fatto, nel 2011, inaugurando una stagione totalmente dedicata ai nuovi talenti, era una rassegna intitolata Nuove Storie, dove c’erano dei giovani sconosciuti ai quali è stata data la possibilità di debuttare o mettere in scena il proprio lavoro in un teatro di primaria importanza, io ero tra quelli. Ogni teatro pubblico dovrebbe riservare il 50 % degli spettacoli alle nuove proposte, per adesso girano solo gli spettacoli prodotti dai teatri stabili, mi augurerei che la legge degli “scambi” fra istituzioni venisse abolita. Esistono alcuni esempi belli di cui mi piacerebbe parlare, che sono tutte le piccole rassegne o piccoli teatri, enti o comuni in cui ho messo in scena Antropolaroid, sono tante, davvero, e non vorrei far torto a nessuno citandone alcune e non altre, ma ci sono. Se si ha voglia di fare le cose si fanno e chi ha il potere di decidere le cose dovrebbe farlo. In Sicilia il teatro Greco di Tindari è gestito molto male, dalla Provincia di Messina. Il mio paese, Patti, e la giovane Direttrice Artistica, Anna Ricciardi, non possono gestire il Teatro Greco per colpa della burocrazia e dei politici che stanno ai vertici della provincia e regione e che a mio avviso sono culturalmente inutili, inetti e inadatti. Io stesso mi sono proposto di prenderlo in gestione, qualche anno fa, ma non mi è stata data la possibilità di farlo.
SA: Hai sottolineato l’importanza del fattore economico, indicando come l’acquisto dello spettacolo e l’investimento da parte dei teatri faccia la differenza. Secondo te qual è il motivo per cui i teatri hanno scelto il tuo spettacolo, aldilà della fortuna? Quali sono i teatri di cui parli? E, soprattutto, cosa significa invece portare avanti uno spettacolo senza una produzione?
TG: Oh mio Dio che domanda… non saprei, forse perché Antropolaroid parla di una famiglia e l’Italia essendo stata fondata con il concetto di famiglia… boh…Tutti l’abbiamo amata o subita, questa micro società che è la famiglia, quindi uno spettacolo che ne parla in modo strano, con un attore che fa tutti i ruoli e che parla il dialetto e che costa poco… un’insieme di tutto questo. Uno spettacolo senza produzione non solo significa zero soldi, che è già un problema, ma significa che gli attori devono fare tutto, proprio tutto, ed è difficilissimo. Bisogna organizzare la sala prove, la convocazione degli attori, i tecnici, tutto quello che serve per le prove, gli arrivi in piazza, i montaggi, gli smontaggi, le buste paga, le locandine i contatti con i teatri… è molto faticoso e spesso gli attori o registi senza una produzione alle spalle si occupano più di organizzare il tutto che di recitare.
SA: Ti piacerebbe tornare in Sicilia?
TG: Quando sento parlare in siciliano subito parlo in dialetto anch’io, per dire quanto mi manca la mia terra, ma la casa è dove tu stai bene. Mi piacerebbe tornare in Sicilia, ma non è una terra che cura i suoi artisti. Basti pensare a Emma Dante, le è stata data una “casa” dalle istituzioni palermitane solo adesso, nonostante sia un’artista di fama internazionale. Mi auguro che le cose cambino, con la nuova direzione del teatro Biondo a Palermo, o a Messina, con i giovani che cercano di riprendere in mano la nostra terra; ci sono dei ragazzi che stanno dicendo “noi ci siamo e vogliamo la nostra Sicilia!”. Vista la situazione, forse è giusto auto-gestire i teatri e riappropriarsi dei nostri spazi, buttiamo fuori il vecchio, ma evitando di ricreare le stesse dinamiche dei vecchi parassiti. Purtroppo nella maggior parte dei casi, in Sicilia, il sistema gestionale del teatro è malato e, sebbene mi piacerebbe tornare, qui a Milano mi sento a casa. A Milano mi hanno aperto le porte e per questo mi sento a casa.
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