CHORÉGRAPHIE ET CONCEPTION Eric Senen INSTALLATION / PHOTOGRAPHIES Fausta Squatriti CRÉATION MUSICALE Davide Anzaghi CONSEILLER ARTISTIQUE Guillaume Lemasson INTERPRÈTES Christine Brunel Fatima N’Doye Charley Guérin RÉGIE GÉNÉRALE, LUMIÈRES ET VIDÉO Stéphane Bordonaro DURÉE 40/50 mn
La démarche chorégraphique se développe toujours chez moi à partir de l’émotion et de l’inconscient dont j’essaie de ne pas entraver le cours. La base de toute création est cet état intérieur en prise directe avec l’imaginaire qui seul permet l’émergence des choses. Je ne cherche jamais à créer des pas,à définir des figures mais au contraire à laisser naître des formes qui elles-mêmes constituent le surgissement du sens. Cela ne peut se faire qu’avec des interprètes exceptionnels qui ont une compréhension intuitive de mon travail. Dans ce cas,je peux faire une chorégraphie rien que par indications,sans avoir à montrer. L’interprète devient alors interprète de ce que je ressens et non de ce que je montre. J’essaie toujours d’éliminer le mimétisme de mon travail car cela crée des barrières dénaturant le sens profond du mouvement et de la chorégraphie. Il est vrai que cela crée des rapports très intenses avec les interprètes. Ce moment de la création où tout provient du tréfonds de la personne constitue un passage très délicat. Il se produit une sorte de corps à corps,avec sa propre sensibilité et celle de l’autre, qui met en jeu des forces obscures que l’on doit à la fois laisser émerger et contrôler. En fait c’est la création elle-même qui prend le contrôle. C’est elle qui détermine les structures en même temps qu’elle prend forme. Une aventure intérieure d’où le créateur fait émerger sa création, qu’il façonne en même temps. Cela représente bien sûr une grande responsabilité de la part du chorégraphe vis à vis de ses danseurs. Mais,en géneral, on sent très bien d’emblée si quelqu’un est prêt à ce voyage intérieur ou non. Il est vrai, qu’on voudrait toujours avoir la personne avec laquelle on travaille comme écoute et comme résonnance. Mais cela peut se faire sans aucun rapport de possession,l’essentiel étant de toujours laisser à l’autre sa liberté. Cette période cruciale dans le processus de la création, est toujours vécue avec une joie intense et une grande inquiétude.C’est un sentiment ambivalent difficile à décrire ; ce qui est certain c’est qu’on arrive à un stade où la sincérité, la charge émotionnelle sont si fortes que les obstacles sautent, les choses deviennent très claires et semblent prendre forme d’elles-mêmes. C’est en général un processus très rapide, l’aboutissement d’un travail souterrain qui, lui, a pu prendre des années.
Souvent, j’ai pensé à des moments de totale détente et d’absence, d’être ailleurs : des moments rares et précieux. J’ai constaté que lorsqu’on ne se sent pas comme d’habitude, pas bien, malade, forcé de s’allonger parce qu’on ne tient plus, on entre dans une phase d’extrême sensibilité, hors du temps et hors du monde, qui permet de créer un endroit où l’on commence finalement à penser. Virginia Woolf dans « On being ill » se demande d’ailleurs pourquoi il n’y a presque rien d’écrit sur la maladie et s’interroge sur le changement brutal de la verticalité à l’horizontalité. Aujourd’hui, je veux tenter de répondre à cette question de Woolf avec la chorégraphie de « The stillest », l’oeuvre de Fausta Squatriti et la musique de Davide Anzaghi. Eric Senen L’installation qui sert de scénographie pour « The stillest », fait partie d’un ensemble sur le thème de la maladie mentale. Je me suis servie de photographies prises dans un hôpital psychiatrique, comme il en reste nombreux de part le monde, et même en Europe. Les malades y sont tenus emprisonnés dans des conditions inhumaines, dans un état de délabrement, d’abandon, privès de dignité. Dans mon oeuvre, je mets en parallèle les documents photographiques et la synthèse symbolique de la géométrie. Photo signifie document, tranche de vie. Géométrie signifie maximum de l’abstraction, de la pureté et en même temps c’est l’explication synthétique de certaines réalités d’ordre conceptuel : la croix, la svastika, le point, la ligne… En complément de ces éléments, il y a de petites boîtes qui conservent les restes qui se référent à la vie précédant la maladie. Ces restes, isolés du contexte, briques, cheveux, fleurs en bronze, deviennent des reliques à conserver en hommage et mémoire de ces vies brisées.
Fausta Squatriti Les trois épisodes dans lesquels s’articulent ma musique composée pour la chorégraphie « The stillest » montrent une simplification de l’écriture qui m’a paru comme une nécessité, étant donné que la musique était destinée à la danse contemporaine. La néo-avantgarde musicale à laquelle j’ai appartenu, a été parfois attirée par des expérimentations autour du langage musical d’un tel paroxysme intellectuel, au point de devenir ésotérique, ou pire, solipsiste. Loin de moi l’idée de lancer des anathèmes contre la néo-avantgarde, qui a été capable d’inventer de nouvelles solutions, j’en stigmatise la frénésie autiste. Mes amis Fausta Squatriti et Eric Senen, en me proposant d’écrire la musique pour « The stillest » et donc pour la scène, m’ont donné l’opportunité de poursuivre mon itinéraire vers une approche plus limpide d’une musique qui surgit d’une conception de la composition qui n’essaie pas de se rapprocher de manière fourbe auprès du « public », mais qui revalorise le rôle et la fonction de l’écoute. Un rôle et une fonction que même le compositeur devrait exercer en se souvenant qu’en les dévalorisant par des codes indéchiffrables, il se dévalorise lui-même.
Davide Anzaghi
The stillest La maladie comme état et expérience Fausta Squatriti Projet chorégraphique inspiré par "On being ill" de Virginia Woolf Le changement brutal de la position verticale et debout à la position allongée et horizontale. Une situation à la marge et non au centre et qui peut laisser le temps et la patience d’observer et contempler les images du monde. L’absence et la distance du monde réel créent une perspective très sensible du quotidien. "There they stand ; and it is of these, the stillest, the most self-sufficient of all things that human beings have made companions; these that symbolise their passions, decorate their festivals, and lie (as if they knew sorrow) upon the pillows of the dead." Virginia Woolf 1926 "On being ill" « Telles sont les fleurs ; et c’est elles, immobiles et pleines d’assurance entre toutes, que les êtres humains ont élues pour compagnes, elles qui symbolisent leurs passions, décorent leurs fêtes et reposent ( comme si elles avaient quelque expérience du chagrin ) sur l’oreiller des morts. » Virginia Woolf 1926 « De la maladie »
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Danse trio [Mains d'Oeuvres] Les 24 et 25 octobre Eric Senen / Cie L&S
Eric Senen Guillaume Lemasson Association Seresta 22, rue Oberkampf 75011 Paris Tél./Fax 01 43 55 69 14 Mobile 06 15 12 30 94 contact@cielets.com http://www.cielets.com Chargées de diffusion et de production : La Boussole Luce Paquet 06 24 22 29 36 Aurélia Boitier 06 62 88 99 20 la-boussole-92@orange.fr
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