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Writing - Writers - Interview | by SuccoAcido writing in Writing - Writers on 19/12/2011 - Comments (0)
 
 
Antonella Moscati

Je pense qu’il y a plusieurs façons de dire la vérité, et la tâche principale, peut être aussi la plus difficile, de ceux qui sont à côté d’un psychotique est de trouver une manière – la meilleure, si possible -– de dire la vérité. Mentir est inutile et dangereux, parce que celui qui délire entend tout de suite la résonance du mensonge dans les mots des autres. Sans doute la peur de la folie est elle si répandue, parce que personne ne se sent en sécurité: chacun sait que la folie est quelque chose qui peut nous arriver à tous.

 
 

SA: Salut, Antonella! Bienvenue sur SuccoAcido. Traducteur et écrivain napolitain, tu t’occupes de philosophie et travailles en collaboration avec la maison d’édition Cronopio. Ton deuxième livre Deliri est sorti pour les éditions nottetempo. Ce sont tes souvenirs des manifestations psychotiques ou para-psychotiques dont tu as été atteinte pendant quinze ans. Comment est née l’idée d’écrire Deliri?
AM: Bonjour. Je veux tout d’abord préciser que ce que j’ai appelé « manifestations psychotique ou para-psychotiques » et dont je parle dans Deliri ne m’ont pas atteinte que pendant quelques jours — une ou deux fois par an — dans l’espace de quinze ans: il s’agissait de crises brèves mais violentes, qui ne duraient jamais plus de trois jours. L’idée de commencer à écrire n’est pas venue tout de suite, mais quelques années plus tard, après la troisième crise, je crois. Je l’ai ressenti comme une nécessité. Avant cette expérience il ne m’était arrivé que rarement, très rarement, d’écrire de la narration, si tant est que Deliri puisse être défini comme une narration. La nécessité venait du fait que je me souvenais de ce qui s’était passé et que je ne voulais pas oublier. Ou plutôt je voulais oublier, mais je ne pouvais pas et il me fallait passer par l’écriture.

SA: As-tu rencontré des difficultés dans la publication du livre? Lesquelles? Et comment les as-tu surmontées?
AM: À l’exception du dernier chapitre, le livre existait déjà avant 2000, bien que dans une forme moins développée et moins « écrite », pour ainsi dire. J’ai essayé de le publier en Italie, mais je n’ai eu aucune réponse de la part des éditeurs auxquels je l’avais envoyé. En revanche il a été publié en France (sous le titre Verbali, Léo Scheer) justement en 2000. En 2006, les éditions nottetempo ont publié Una quasi eternità (L’étérnité ou presque, Arléa 2009), et c’est à ce moment-là que l’éditeur Ginevra Bompiani m’a demandé de publier Deliri. Je me suis donc remise au travail et l’édition italienne est un peu différente de l’édition française, puisque le ton est plus détendu, plus « narratif » et moins argumentatif. Je dirais que la distance – temporelle mais pas seulement celle-là – m’a permis d’améliorer la qualité de l’écriture. Quant à la difficulté psychologique ou plutôt à la pudeur qui aurait pu me conduire à ne pas publier ce que j’avais écrit, je crois que lorsque nous écrivons quelque chose, ce quelque chose se détache de nous et en quelque sorte ne nous appartient déjà plus. Par ailleurs je pensais sincèrement que le fait d’écrire ou de décrire mes crises pouvait être utile à ceux qui avaient eu des expériences comme la mienne, mais ne s’en souvenaient pas ou n’étaient pas en état d’en parler.

SA: Dans l’introduction de Deliri, tu fais une distinction entre raconter, « la forme la plus haute et éloignée du discours, la forme qui a son siège, pour ainsi dire, dans la partie la plus extérieure de notre esprit, dans la surface de sa peau, dans la feuille mince qui la referme et qui est la première à se déchirer quand nous sortons de nous-mêmes », et délirer, que tu associes à la capacité d’inférer, argumenter, déduire ou syllogiser, « activités plus archaïques, nées avant la mémoire historique et liées sans doute à notre survie ».
Comme tu dis, ce dont tu te souviens et que tu racontes dans ton livre est moins l’objet de tes pensées que le raisonnement exalté qui était suivi d’un sentiment de certitude inéluctable.
As-tu jamais pensé que, en raison de sa nature intime et de ses origines archaïques, dans le délire tu trouvais une sorte de dimension authentique, naïve à certains égards, dans laquelle t’exprimer?

AM: Authentique oui, car le délire est au-delà de toute fiction possible, naïve je ne sais pas, parce que les délires n’ont rien de naïf. Sauf si on entend naïf au sens de primitif ou d’archaïque, un peu dans le sens que Schiller donne à ce mot, quand il fait la différence entre poésie naïve et sentimentale, c’est à dire moderne. Quand je dis archaïque, je pense à quelque chose qui vient de très loin, de si loin qu’il devient impersonnel comme si on avait touché à une couche qui ne nous appartient pas et qui est commune à tous. C’est sans doute cette dimension impersonnelle qui produit un déracinement, parce qu’on est presque « possédé » par quelque chose d’incontrôlable qui vient d’ailleurs.

SA: Quand tu racontes ton premier délire, tu dis l’avoir perçu comme une grande intuition philosophique qui impliquait la culpabilité de la révélation, à la manière de la hýbris de Bellérophon et du péché originel d’Adam et Eve. Mais entre la folie et la mort, tu as choisi la première.
Après la crise as-tu repris, d’une façon ou d’une autre, cette intuition, en la développant par exemple dans ton travail?

AM: Je voudrais être capable de mettre sous forme « métaphysique » quelques intuitions que j’ai eus pendant les délires, ou même être capable de penser sous forme philosophique ce qu’est un délire –au-delà ou en deçà de la psychologie et de la psychiatrie. Je ne sais pas si j’en suis capable. J’aimerais bien le faire, mais je ne sais si j’en suis capable. Si j’avais à choisir entre la folie et la mort, je choisirais sûrement, aujourd’hui comme il y a vingt ans, la folie, puisque de la folie je n’ai jamais eu (beaucoup de) peur, mais de la mort oui, beaucoup, certainement trop.

SA: Dans la deuxième partie de Deliri, tu t’arrêtes sur tes vacances dans le Sud de la France, à la fin de l’été: « Je fus aidée par ce qui m’apparut alors – en présence de la mer et des lumières de la Provence – comme la vrai limite du langage et de la folie, c’est-à-dire les choses mêmes. Chaque bonheur que nous éprouvons dérive du primat de la chose sur l’image que nous avons d’elle […], de la chose palpable, audible qu’on peut savourer, et dans laquelle les sens prennent demeure, dispensant la sérénité ».
C’est ce que tu appelles la paix des sens, une source de soulagement que chacun devrait découvrir et rechercher…

AM: Délirer signifie d’une certaine façon être prisonnier du langage et de son jeu, des ambiguïtés, des homonymies, des références infinies que chaque mot traîne derrière soi. Le premier effet de cette prison est qu’on s’éloigne de l’univers du sens, d’un côté, et des sens, de l’autre. Dans un délire le sens est toujours trop: tout a une clarté aveuglante, une explication définitive et péremptoire. Sous cette lumière aveuglante ce que normalement nous appelons le sens, une sorte d’orientation incertaine, une voie qui est recherchée et parcourue avec peu de certitudes et un peu d’inquiétude, finit par disparaître. Tandis que les sens, comme tout ce qui est physique, sont comme suspendus, puisque chaque sensation n’est pas éprouvée en tant que telle, mais elle est pour ainsi dire anticipée par ce que notre pensée imagine et invente autour et même avant elle. Rétablir l’autonomie des sens m’a toujours paru la première étape vers la guérison. « Foutre la paix aux sens », j’aurais envie de dire, c’est-à-dire les laisser faire leur travail, sans anticiper les résultats. Il me semble que c’est une bonne recette pour limiter le pouvoir du langage.

SA: Y a-t-il des lectures qui ont eu un effet thérapeutique sur toi ou qui ont représenté une occasion précieuse pour une comparaison avec ton expérience?
AM: La Critique de la Raison Pure et Orgueil et Préjugés, c’est-à-dire Kant et Jane Austen, les antipodes et les antidotes contre toute forme de folie, donc des grandes thérapeutes. Le premier m’a permis de continuer dans la philosophie et d’écrire ma thèse, la seconde était toujours le premier auteur dont j’avais envie quand la crise était terminée.

SA: La peur de la folie ... comment la gérer, à ton avis?
AM: C’est un problème qui touche principalement le personnel médical - médecins, psychiatres, psychologues – ainsi que les proches ou les amis de ceux qui délirent. Je pense que les erreurs viennent souvent d’une évidente peur de la folie. Parmi ces erreurs il y a surtout le fait de garder le silence ou, pire encore, de mentir constamment. Je pense qu’il y a plusieurs façons de dire la vérité, et la tâche principale, peut être aussi la plus difficile, de ceux qui sont à côté d’un psychotique est de trouver une manière – la meilleure, si possible -– de dire la vérité. Mentir est inutile et dangereux, parce que celui qui délire entend tout de suite la résonance du mensonge dans les mots des autres. Sans doute la peur de la folie est elle si répandue, parce que personne ne se sent en sécurité: chacun sait que la folie est quelque chose qui peut nous arriver à tous.

SA: En Italie Deliri a été accueilli par le public et les critiques autrement qu’en France? D’après toi, pourquoi?
AM: En Italie, j’avais déjà publié Una quasi eternità qui avait eu un petit succès, alors que lorsque le livre est sorti en France j’étais complètement inconnue. En France, Verbali a été très bien accueilli par la critique et le public spécialisé, surtout par les psychanalystes. En Italie, seulement après le festival de Mantoue, auquel j’étais invitée avec un psychiatre et une psychanalyste, le livre a été reconnu comme un témoignage utile pour ceux qui sont confrontés à des expériences analogues.

SA: En 2010 tu as pris part au Festivaletteratura de Mantoue. Qu’est-ce que tu penses de ce genre d’événements culturels?
AM: A Mantoue j’ai compris que dans ce genre de festivals les auteurs doivent faire une véritable performance pour convaincre le public de lire leur livre. Car paradoxalement (mais conformément aux habitudes de la société contemporaine) celui qui écrit est beaucoup plus important que ce qu’il écrit, et ce qui a été écrit (le livre) est beaucoup moins important que l’image que celui qui l’a écrit est en mesure de donner de lui-même. Ce-là dit, on rencontre un très large public, socialement et culturellement très composite, un public que, autrement, je n’aurais jamais eu l’occasion de rencontrer. Donc il faut apprendre à dire les choses qu’on a envie de dire dans un temps très court et avec des mots très simples. C’est un utile exercice de synthèse. Sans oublier, d’ailleurs, la rencontre fructueuse avec les psychiatres et les psychanalystes que j’ai rencontrés là-bas.

SA: Par tes lecteurs, as-tu reçu un commentaire sur le livre qui t’a particulièrement frappé?

AM: Il y eu une lecture organisée, dans un service psychiatrique près de Vérone, par une amie psychiatre, Francesca Gomez, et par Cristina Faccincani, la psychiatre psychanalyste avec qui j’avais dialogué à Mantoue. C’était très émouvant. Les patients ont commencé à raconter leurs histoires, parfois pour la première fois, en face de thérapeutes, médecins et infirmières. Beaucoup d’entre eux étaient soulagés à l’idée de pouvoir parler ouvertement de leurs expériences, sans forcément se sentir « malade ». Et surtout ils étaient soulagés de connaître et d’écouter une personne qui, tout en vivant une vie censément « normale », pouvait parler ouvertement de ses crises psychotiques.

SA: Et par tes collègues, philosophes et écrivains?
AM: La réaction la plus curieuse a été celle d’un ami français, philosophe, à qui j’avais donné le livre, peu de temps après que nous nous étions connus. Après l’avoir lu, il était tellement gêné qu’il ne pouvait pas m’en parler. Il croyait que je lui avais fait lire quelque chose de trop personnel. Puis, heureusement, nous en avons parlé. D’ailleurs il n’a pas été le seul à réagir ainsi.

SA: L’idée d’une éventuelle transposition théâtrale ou cinématographique de Deliri, t’intrigue-t-elle?
AM: Une adaptation cinématographique me semble non seulement très improbable, mais aussi très difficile à imaginer. Une transposition théâtrale serait sûrement plus faisable. Oui, je pense que ça m’intéresserait. C’est très étrange d’écouter ses propres paroles récitées par les autres, on comprend qu’elles peuvent prendre un sens auquel on n’avait jamais pensé.

SA: Naples, Sienne et Paris: parle-nous de ton lien avec ces trois villes…
AM: Trois réalités très différentes, c’est sûr, d’autant plus que Sienne pour moi ne signifie pas la ville de Sienne, mais la campagne dans la province de Sienne où je vis, le petit village de Monti, ou, plutôt petit encore, le hameau de Colle di San Marcellino. Naples est la ville de l’adolescence. Je ne dis pas de l’enfance, bien que j’y sois née et j’y aie vécu jusqu’à l’âge de ma maîtrise. Les images de Naples les plus fortes sont celles de l’adolescence, à l’époque du collège et du lycée, des belles années de l’université. Naples, à la fin des années 70, avant le séisme de 81, une Naples pleine de choses, où il y avait une cinémathèque du plus haut niveau et de très beaux concerts de musique classique et de musique contemporaine; là où certains amis commençaient à faire du théâtre et où proliféraient les collectifs féministes; là où je me sentais en sécurité à juste titre, parce que je pouvais me promener seule la nuit, et que le seul risque était qu’on me fauche le portefeuille dans un bus plein de gens, avec une telle dextérité que je ne m’en aperçoive même pas. Paris a été la ville de mon devenir adulte, de la rencontre avec l’homme de ma vie. La ville de la découverte de la philosophie française, sur laquelle il y avait en Italie quasiment un ostracisme, et la ville de la psychanalyse. Paris, je l’ai aimé tendrement, et quand je suis retournée en Italie je me sentais comme quelqu’un qui a perdu son amant. San Marcellino a été toujours autre chose, un choix forcé où, bien qu’entourée par la vraie beauté, je ne me suis jamais sentie vraiment chez moi. Mais maintenant j’aurais beaucoup de mal à y renoncer.

SA: Quelles opportunités t’a donné l’étranger? À cet égard, as-tu jamais songé à quitter l’Italie?
AM: D’abord, l’opportunité d’apprendre au moins une langue étrangère. Si l’on ne vit pas dans un pays étranger on n’apprend jamais sa langue. Même si l’on connaît déjà cette langue, l’effet d’en être entouré du matin au soir change complètement les choses. Et c’est une belle expérience, qui apprend à regarder la langue maternelle avec des yeux différents. Et quand on habite à l’étranger, on réalise que son lieu d’origine est en soi, non pas en dehors de soi.
Si j’ai songé à quitter l’Italie? Sans cesse. Et finalement, d’une certaine manière, je l’ai quittée.

SA: Voudrais-tu partager avec les lecteurs de SuccoAcido tes impressions sur la fin du quatrième gouvernement Berlusconi et tes attentes au sujet des changements qui ont lieu?
AM: Eh bien, j’aurais préféré que ce ne soit pas lui qui s’en aille, mais que nous le renvoyions, nous. Il est possible que Berlusconi soit fini, mais il n’est pas du tout certain que le berlusconisme soit fini: je n’aimerais vraiment pas que cette fin précoce produise des nostalgies. Le berlusconisme est un phénomène mental, et donc on aura besoin de plusieurs années de véritable culture pour pouvoir le dissiper. Espérons-le, même si l’avenir immédiat sera sûrement très difficile.

SA: Quels sont tes prochains projets?

AM: Je suis dans une phase un peu étrange de ma vie, j’aurais besoin de recommencer à travailler sérieusement, j’aimerais revenir aux classiques de la philosophie. Mais je n’ai pas beaucoup de temps entre les traductions et les révisions. J’ai beaucoup de matériel pour un livre sur une maison d’enfance, à la campagne.

 
Antonella Moscati

“Credo che ci siano molti modi di dire la verità, e il compito principale, e forse anche il più difficile, di chi ha a che fare con qualcuno che ha una crisi psicotica è proprio quello di trovare il modo più giusto per dire la verità. Mentire è sempre sbagliato, perché se c’è una cosa che addirittura si affina in un delirio è proprio la capacità di sentire le risonanze della menzogna nella parola degli altri. Probabilmente la paura della follia è così diffusa, proprio perché nessuno se ne sente al riparo. Sappiamo che è qualcosa che potrebbe capitare a tutti.”

 
 

SA: Ciao, Antonella! Benvenuta su SuccoAcido. Traduttrice e scrittrice napoletana, ti occupi di filosofia e collabori con la casa editrice Cronopio. Per le edizioni nottetempo, è uscito il tuo secondo libro Deliri, una raccolta dei tuoi ricordi, legati alle manifestazioni psicotiche o parapsicotiche da cui sei stata affetta per quindici anni. Com’è nata l’idea di scrivere Deliri?
AM: Beh, innanzitutto vorrei precisare che quelle che ho chiamato “manifestazioni psicotiche o parapsicotiche” e di cui racconto in Deliri, mi hanno affetto durante quindici anni, cioè lungo l’arco di quindici anni, una o al massimo due volte l’anno, ma spesso anche ogni due o tre anni: si trattava di brevi, ma violenti deliri, che non duravano però mai più di tre giorni. L’idea di cominciare a scriverne mi è venuta qualche anno dopo la prima crisi, dopo la terza crisi, direi. L’ho sentita come una necessità. In effetti, prima di quell’esperienza mi era capitato solo raramente, molto raramente, di cimentarmi con la scrittura non saggistica, “narrativa”, sempre che Deliri si possa definire un libro di narrativa. La necessità derivava innanzitutto dal fatto che ricordavo molto di quello che mi era successo, e in qualche modo non volevo dimenticarlo. Anzi, forse volevo dimenticarlo, ma non mi era possibile, se non passando attraverso la scrittura.

SA: Hai incontrato difficoltà nella pubblicazione del libro? In caso affermativo, quali? E come le hai superate?
AM: Il libro, tranne l’ultimo capitolo, era stato scritto, anche se in una forma meno elaborata, già prima del 2000. Avevo cercato di pubblicarlo in Italia ma non avevo avuto nessuna risposta dagli editori a cui l’avevo mandato. Mi è riuscito invece di pubblicarlo in Francia, nel 2000 appunto. Nel 2006 le edizioni nottetempo hanno pubblicato Una quasi eternità ed è stato allora che l’editrice Ginevra Bompiani mi ha proposto di pubblicare anche Deliri. Poiché era passato parecchio tempo, ci ho rimesso le mani e così l’edizione italiana è un po’ diversa da quella francese, perché il tono è più pacato, più “narrativo” e meno argomentativo. Direi che la distanza, soprattutto temporale, mi ha permesso di migliorare la qualità della scrittura. Quanto alla difficoltà psicologica o meglio al pudore che avrebbe potuto indurmi a non pubblicare quel che avevo scritto, credo che quando scriviamo, qualcosa si stacca da noi e in qualche modo non ci appartiene più. Inoltre pensavo sinceramente che potesse essere d’aiuto a chi avesse fatto esperienze analoghe alla mia, ma o non ricordasse o non avesse avuto modo di raccontarle.

SA: Nella premessa di Deliri, fai distinzione tra raccontare, “la forma più alta e distante del discorso, la forma che ha sede, per così dire, nella parte più esterna della nostra mente, nella superficie della sua pelle, nella sfoglia sottile che la richiude e che è la prima a lacerarsi quando usciamo da noi stessi”, e delirare, che accosti alle capacità di inferire, argomentare, dedurre e sillogizzare, “attività più arcaiche, nate ancor prima della memoria storica e legate in qualche modo alla nostra stessa sopravvivenza”.
Come tu stessa affermi, ciò che ti è rimasto, a distanza di tempo, dell’esperienza del delirio non è tanto il ricordo dell’oggetto dei tuoi pensieri quanto quello del ragionamento che conducevi nell’esaltazione, cui si accompagnava un senso di certezza ineluttabile.

Hai mai pensato che, proprio per la sua natura intima e le sue origini arcaiche, nel delirio ritrovassi una sorta di dimensione autentica, per certi versi anche ingenua, in cui esprimerti?
AM: Autentica sicuramente, perché al di là di ogni finzione possibile, ingenua non saprei, perché i deliri non hanno niente di ingenuo, a meno che non intendi ingenuo nel senso di primitivo o di arcaico, un po’ nel senso in cui Schiller parla della poesia ingenua contrapponendola a quella sentimentale, cioè moderna. Quando dico arcaico, penso a qualcosa che viene dal profondo, da una dimensione così sotterranea da sembrare addirittura impersonale, come se raggiungessimo uno strato che cessa di appartenere a noi stessi e che per questo ci accomuna ad altri. Forse è proprio questa dimensione impersonale che produce spaesamento, perché ti senti quasi “posseduta” da qualcosa che non solo non controlli, ma che soprattutto non pare più provenire da te stessa.

SA: Quando racconti del tuo primo delirio, dici di averlo percepito come una grande intuizione filosofica che implicava la colpa della rivelazione, alla stregua della hýbris di Bellerofonte e del peccato originale di Adamo ed Eva. Ma tra la follia e la morte, hai scelto la prima.
Passata la crisi, hai recuperato in qualche modo quella intuizione, sviluppandola per esempio nel tuo lavoro?

AM: Mi piacerebbe riuscire a mettere in forma “metafisica” alcune delle intuizioni avute durante i deliri, o anche riuscire a pensare in forma filosofica che cos’è un delirio. Al di là o al di qua, quindi, della psicologia o della psichiatria. Non so se ci riuscirò. Sicuramente mi piacerebbe, ma non so se ci riuscirò. Se dovessi scegliere fra la follia e la morte, sicuramente sceglierei, ora come allora, la follia, perché curiosamente della follia non ho mai avuto (tanta) paura, della morte invece sì, molta, sicuramente troppa.

SA: Nella seconda parte di Deliri, ti soffermi su una tua vacanza nel Sud della Francia, alla fine dell’estate: “Fui aiutata dall’acqua del mare e dalle luci della Provenza, da ciò che in quell’occasione mi si chiarì come il vero limite del linguaggio e della follia: la bellezza delle cose. Da allora ogni felicità che provo mi pare provenire da un primato della cosa ‘in carne e ossa’ sull’immagine che ce ne facciamo: primato della cosa palpabile, assaporabile, udibile, in cui i sensi si accasano, distribuendo quiete”.
È quella che chiami la pace dei sensi, una fonte di sollievo che ognuno di noi dovrebbe riscoprire e ricercare…

AM: Delirare significa in qualche modo essere prigionieri del linguaggio e dei suoi giochi, delle sue equivocità, delle sue omonimie, degli infiniti rimandi che ogni parola porta con sé. Il primo effetto di questa prigionia è quello di allontanarti dall’universo del senso e dei sensi, anche se in modo opposto. In un delirio, infatti, il senso è sempre troppo: tutto acquista una chiarezza accecante, una spiegazione definitiva e perentoria. In questa luce accecante quello che normalmente chiamiamo il senso, una sorta di orientamento insicuro, una strada che va cercata e imboccata con poche certezze e qualche trepidazione, non ha posto. I sensi, poi, così come tutto ciò che è fisico, sono messi in una sorta di sospensione, perché ogni sensazione non è vissuta come tale, ma è per così dire anticipata da ciò che il nostro pensiero prevede, immagina, organizza attorno e soprattutto prima di quella sensazione, offuscandola. È per questo che restituire ai sensi la loro autonomia mi è sempre sembrato il primo passo verso la guarigione. Lasciare in pace i sensi, mi verrebbe da dire, lasciare cioè che facciano il loro lavoro, senza anticiparne i risultati. Mi sembra una buona ricetta per limitare il potere del linguaggio.

SA: Ci sono state delle letture che hanno avuto in te un effetto terapeutico o che hanno rappresentato una preziosa occasione di confronto con la tua personale esperienza?
AM: La Critica della ragion pura e Orgoglio e pregiudizio, cioè Kant e Jane Austen, gli antipodi di e gli antidoti a ogni forma di follia, quindi dei grandi terapeuti. Il primo mi ha permesso di andare avanti in filosofia e scrivere la tesi di dottorato, la seconda era sempre il primo scrittore che avevo voglia di leggere quando la crisi era passata.

SA: La paura di fronte alla manifestazione della follia… come andrebbe gestita, secondo te?
AM: Questo è un problema che riguarda soprattutto il personale terapeutico – medici, psichiatri, psicologi – e, ovviamente, le persone, familiari e amici, che stanno accanto a chi delira. Credo che la maggior parte di queste persone compia molti errori, proprio perché non riesce a vincere la propria paura di fronte alla follia. Tra questi errori c’è soprattutto il fatto di tacere o, ancor peggio, di mentire continuamente. Credo che ci siano molti modi di dire la verità, e il compito principale, e forse anche il più difficile, di chi ha a che fare con qualcuno che ha una crisi psicotica è proprio quello di trovare il modo più giusto per dire la verità. Mentire è sempre sbagliato, perché se c’è una cosa che addirittura si affina in un delirio è proprio la capacità di sentire le risonanze della menzogna nella parola degli altri. Probabilmente la paura della follia è così diffusa, proprio perché nessuno se ne sente al riparo. Sappiamo che è qualcosa che potrebbe capitare a tutti.

SA: In Italia Deliri è stato accolto, dal pubblico e dalla critica, diversamente che in Francia? Perché, secondo te?
AM: In Italia avevo già pubblicato Una quasi eternità che aveva avuto il suo piccolo successo, mentre in Francia ero completamente sconosciuta. In Francia c’è stata un’ottima accoglienza da parte della critica e di un pubblico molto specialistico, psicanalisti soprattutto. In Italia è stato solo dopo il festival di Mantova, cui ho partecipato insieme a uno psichiatra e a una psicanalista, che il libro è stato riconosciuto come una sorta di testimonianza scritta soprattutto per coloro che hanno a che fare con esperienze simili a quelle che racconto.

SA: Nel 2010 hai preso parte al Festivaletteratura di Mantova. Cosa ne pensi di questo genere di manifestazioni culturali?
AM: Mantova è un luogo strano, hai la sensazione di dover fare una vera e propria performance per riuscire a convincere il pubblico a leggere il tuo libro. Perché l’autore è paradossalmente (ma in sintonia con le abitudini della società contemporanea) molto più importante di quello che ha scritto. Il libro è secondario rispetto all’immagine che chi l’ha scritto riesce a dare di se stesso. Allo stesso tempo, però, capita di incontrare un pubblico molto ampio, estremamente composito sia socialmente che culturalmente, un pubblico che io altrimenti non avrei mai avuto l’occasione di incontrare. È un’esperienza interessante, perché devi imparare a dire le cose che ti stanno a cuore in tempi molto brevi e con parole molto semplici. Sei costretto quindi a un utile esercizio di sintesi. Senza contare, poi, il confronto fruttuoso con psichiatri e psicanalisti che ho conosciuto in quella sede.

SA: Da parte dei tuoi lettori, hai ricevuto un commento sul libro che ti ha particolarmente colpito?
AM: L’incontro più emozionante è stata una presentazione del libro fatta in un servizio psichiatrico vicino a Verona, organizzata da un’amica psichiatra, Francesca Gomez, e da Cristina Faccincani, la psichiatra psicanalista con cui avevo dialogato a Mantova. I pazienti hanno raccontato le loro storie, talvolta per la prima volta, davanti a terapeuti, medici e infermieri. Molti di loro erano sollevati all’idea di poter parlare apertamente delle proprie esperienze, senza sentirsi necessariamente “malati”. E soprattutto erano sollevati all’idea di conoscere e ascoltare una persona che, pur conducendo una vita per così dire “normale”, parlava apertamente delle proprie crisi psicotiche.

SA: E da parte dei tuoi colleghi, filosofi e scrittori?
AM: La reazione più curiosa è stata quella di un amico francese, filosofo, a cui avevo regalato il libro, poco dopo che ci eravamo conosciuti. Dopo averlo letto, era talmente imbarazzato che non riusciva a parlarmene. Riteneva che gli avessi fatto leggere qualcosa di troppo personale. Poi per fortuna ci siamo chiariti. D’altronde non è stato l’unico a reagire così.

SA: L’idea di una eventuale trasposizione teatrale o cinematografica di Deliri ti incuriosisce?
AM: Una trasposizione cinematografica mi sembra non solo assolutamente improbabile, ma anche molto difficilmente immaginabile. Una trasposizione teatrale sarebbe sicuramente più fattibile. Sì credo che m’incuriosirebbe. È un’esperienza molto strana sentire recitate da altri le proprie parole, capisci che possono assumere un significato a cui neanche avevi pensato.

SA: Napoli, Siena e Parigi: ci parleresti del tuo rapporto con queste tre città?
AM: Tre realtà molto diverse, questo è certo, tanto più che Siena per me non significa la città di Siena, ma la campagna in provincia di Siena dove vivo, il piccolissimo paese di Monti, e anzi l’ancor più piccolo borgo di Colle di San Marcellino. Napoli è la città dell’adolescenza. Non dico dell’infanzia benché ci sia nata e sia sempre vissuta lì fino alla fine dell’università. Le immagini di Napoli più forti sono quelle dell’adolescenza, della scuola media e del liceo, dei bellissimi anni dell’università. Napoli alla fine degli anni 70, prima del terremoto dell’81, una Napoli piena di cose, con una cineteca di altissimo livello, in cui ho visto tutti i classici del cinema, con bellissimi concerti di musica classica e di musica contemporanea. Dove alcuni amici cominciavano a fare teatro e c’erano tanti collettivi femministi. Dove mi sentivo giustamente sicura, perché potevo girare di notte da sola, e l’unico rischio era che mi fregassero il portafogli in un autobus pieno di gente, con tale destrezza che neanche me ne accorgevo. Parigi è stata la città del mio divenire adulta, dell’incontro con l’uomo della mia vita. La città della scoperta della filosofia francese su cui in Italia c’era quasi un ostracismo e della psicanalisi. Parigi l’ho amata profondamente, e quando sono tornata in Italia mi sono sentita come qualcuno che perde un amante. San Marcellino è stata sempre un’altra cosa, una scelta forzata dove, anche se circondata da tanta bellezza, non mi sono mai sentita veramente a casa, e di cui però oggi non riesco più a fare a meno.

SA: Quali opportunità ti ha offerto l’estero? E a questo proposito, hai mai pensato di lasciare l’Italia?
AM: Intanto quella di imparare bene almeno una lingua straniera. Finché non vivi in un certo paese non riesci mai veramente a impararne la lingua. Anche se la conosci bene, quando sei immerso nella lingua straniera l’effetto è completamente diverso. Ed è una bella esperienza, perché ti insegna a guardare alla tua lingua materna con altri occhi. E poi quando vivi all’estero capisci che il tuo luogo d’origine è dentro di te, non fuori di te.
Se ho pensato di lasciare l’Italia? Continuamente, moltissime volte. E in fondo in parte l’ho anche lasciata…

SA: Vorresti condividere con i lettori di SuccoAcido le tue impressioni sulla fine del quarto governo Berlusconi e le tue aspettative sui cambiamenti in atto?
AM: Beh avrei preferito che non fosse stato lui ad andarsene, ma noi a mandarlo via. E poi Berlusconi forse è anche finito, ma non è affatto detto che sia finito il berlusconismo. E non vorrei che questa fine anticipata rischiasse di produrre improponibili nostalgie. Il berlusconismo è un fenomeno mentale, e come tale ci vorranno anni e anni di vera cultura per poterlo dissipare. Speriamo bene, anche se il futuro immediato sarà sicuramente molto duro.

SA: Progetti futuri?
AM: Sono in una fase un po’ strana della mia vita, avrei bisogno di rimettermi a studiare seriamente, tornare ai classici della filosofia. Ma non ho molto tempo, tra traduzioni e revisioni. Ho un bel po’ di materiale per un libro su una casa dell’infanzia, in campagna.

 


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Pen: Emilia Calabria

Traduction française: Antonella Moscati, Emilia Calabria

 
 
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Antonella Moscati (photo © Jean Luc Nancy)
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Antonella Moscati, Deliri, Edizioni nottetempo, giugno 2009 (Copertina)
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