Evénement: Avant-première au Capitole en présence de Vittorio Taviani > Cesare deve morire, le mardi 16 avril à 20h30
Paysages entre utopie et réel Nés dans une famille bourgeoise d’une petite ville de Toscane au tournant des années 1930, marqués par la guerre, Paolo et Vittorio Taviani s’initient adolescents à la culture cinématographique avec les films du néoréalisme (Rossellini, De Sica, Visconti), se passionnent pour les grands auteurs de la littérature européenne et découvrent la musique, l’opéra et le théâtre au Maggio Musicale Fiorentino (manifestation née à Florence en 1933). Cet ensemble de connaissances et d’expériences, liées à une formation politique de gauche – à la fin des années 1940 en Toscane, les liens avec la Resistenza et la lutte antifasciste sont encore extrêmement forts – sont à la base de l’œuvre des deux frères. Leurs débuts, dans les années 1960, coïncide avec une période particulièrement faste du cinéma italien. Le grand public remplit les salles pour voir les films des maestri du néoréalisme, de nouvelles perspectives économiques permettent à de nombreux aspirants cinéastes de réaliser leur premier film: Olmi, Pasolini, Bertolucci, Ferreri, Petri, Scola ou encore Cavani, et les Taviani. Coréalisé par Valentino Orsini, Un Uomo da bruciare naît ainsi sous l’influence du néoréalisme tout en refusant le «schématisme naturaliste» dans lequel le cinéma italien était tombé: «Le film n’entendait pas être le ‘miroir’ d’une réalité […] il cherchait à médiatiser la réalité à travers le langage en révélant clairement sa nature de ‘fiction’, de spectacle», déclare Paolo en interview. On y trouve déjà plusieurs thèmes et approches formelles qui constitueront toute l’œuvre des cinéastes: le sentiment puissant du paysage (de leur Toscane natale mais aussi de Sicile ou de Sardaigne), la théâtralité, le dialogue avec l’Histoire. Après une première phase très politique – le cinéma de l’Utopie avec I Sovversivi, San Michele aveva un gallo ou Allónsanfan – les Taviani se focalisent sur un autre thème: le rapport de l’homme avec la nature. Padre Padrone en est le meilleur exemple. Tourné en 16mm pour la télévision avec un petit budget, c’est le premier film à remporter la Palme d’or et le Prix de la critique à Cannes (fortement soutenu par Rossellini, président du jury). A partir des années 1980, les cinéastes expérimentent de nouvelles techniques de narration, proches du conte et des fables (La Notte di San Lorenzo, Good Morning Babilonia), toujours avec des références à l’Histoire, collective ou personnelle, et à la littérature: Tolstoï (Il Sole anche di notte), Goethe (Les Affinités électives), Pirandello (Kaos et Tu ridi), Antonia Arslan (La Masseria delle allodole) ou même Shakespeare (Cesare deve morire). Avec le temps, leur cinéma évolue vers une vision plus pessimiste et sombre. La structure narrative chorale s’aventure vers un regard plus direct et subjectif. Ce qui frappe dans ce parcours de cinquante ans à travers ses constantes et ses expérimentations, c’est sa cohérence, dans une quête perpétuelle de représentation de la réalité à travers ses multiples facettes. Chicca Bergonzi
Paolo et Vittorio Taviani Réalisateurs et coscénaristes de tous leurs films, Paolo et Vittorio Taviani naissent en 1929 et en 1931 à San Miniato di Pisa, en Italie. Installés à Pise en 1944, les deux frères étudient l’art et fréquentent le ciné-club, où ils rencontrent Valentino Orsini. Abandonnant l’université pour se consacrer à leur vocation – après avoir vu Païsa de Rossellini – ils réalisent dès 1954 avec Orsini plusieurs courts métrages documentaires et leur premier long, Un Uomo da bruciare (1961). Ce film marque le début d’une longue carrière qui couvre cinquante ans de cinéma italien. Les Taviani ont reçu de nombreux prix dont une Palme d’or (Padre Padrone) et le Grand Prix du jury à Cannes (La Notte di San Lorenzo), le Lion d’or pour leur carrière à Venise et l’Ours d’or à Berlin pour Cesare deve morire.
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