Leur format varie, pouvant aller du carnet de dessins à l’intervention de l’artiste in situ. La virtuosité et la sobriété du trait illustrent des événements improbables, animés d’une vaste gamme de dynamiques. Les dessins deviennent le lieu privilégié de mises en situation dans lesquelles les différents protagonistes, vivants ou inanimés, sont en proie à des tensions, des lévitations, des mouvements contrariés, à des dialogues muets. Abdelkader Benchamma invente du mobilier passe-muraille, des architectures instables, une nature capable d’ensevelissements, d’écrasements. Ses espaces naturels sont parfois occupés par des hordes de gens. Ils deviennent le lieu de courses, de rassemblements, de luttes dont le motif reste incertain. Mobilier, personnages, plantes peuplent un même univers obéissant à des lois déconcertantes, dans lequel les sujets d’Abdelkader Benchamma semblent être les victimes de forces inconnues. La nature est figurée par un agencement fluide de motifs récurrents, accolés les uns aux autres pour recréer la puissance de paysages de montagne ou le foisonnement d’herbes et de plantes. Le graphisme sinueux de la végétation, le traitement des tas (mêlant parfois l’humain à l’organique) accentue le caractère anxiogène de certaines situations. L’accumulation de formes, leur quantité surnuméraire tendant vers l’infini et l’impression de saturation qui en émane, participent de la capacité du dessin à projeter le spectateur au-delà de la feuille. L’artiste manie l’absurde et mesure ses effets visuels avec une grande précision. L’épure et l’intensité du trait des scènes présentées expriment des ambiances immédiates et fortes, provoquant la remise en question et la mise à mal d’une réalité stable. |